Humeurs taurines et éclectiques

lundi 25 février 2013

Edward Sheriff CURTIS

Vous ai-je déjà entretenu d’Edward Sheriff CURTIS?
Oui, bien sûr, dans un précédent article (
http://bregaorthez.blogspot.fr/search/label/Edward%20Sheriff%20Curtis).
J’ai réussi à me procurer son «meilleur vendeur»: «Les Indiens d’Amérique du Nord, les Portfolios complets» Edward Sheriff Curtis, Taschen, 1997 dont on peut encore récupérer quelques exemplaires avant épuisement définitif.

Ses clichés me laissent rêveur. Voilà bien l'un des rares produits qui font honneur au Nouveau Monde. Mi-Indiana Jones, mi-Jack London et pour faire bonne mesure avec un troisième «mi» de Danse avec les Loups.
Un autodidacte complet, qui fabriqua sa propre machine à voler les images. D’apprenti photographe à 18 ans, il se mue en explorateur qui ne cessera plus de 1907 à 1930 d’arpenter l’Amérique du Nord pour recueillir précieusement les derniers témoignages d’une civilisation et d’un peuple qui se mourraient. Et d'explorateur, il deviendra ethnologue, mieux: humaniste! Tout cela sans savoir le grec, le latin et l'usure des fonds de culottes sur les mornes bancs d'université. Le miracle américain, le vrai, celui qui permettait de tout rêver, avant les subprimes, les fonds de pension et la dictature des Standard & Poor's et des Lehman Brothers.

80 tribus visitées au cours de plus de 125 voyages, 40000 clichés réalisés sur 30 ans, sans compter dessins, enregistrements et films.

Quand je contemple ses photos -ses chefs d’œuvres devrais-je plutôt écrire- j’y retrouve l’émotion que délivre l’œuvre également inégalable de ce grand «pec» de Félix Arnaudin qui a de même capturé les derniers frémissements de la vie de la Grande Lande de Gascogne, du temps où l’on pouvait y contempler l’horizon à perte de vue, sans que la forêt vienne cacher l’arbre.
Les deux types se ressemblent physiquement d’ailleurs et les deux usaient du matériel le plus rudimentaire qui soit, sans pixels, sans super zooms, sans électronique, mais avec les deux ingrédients indispensable du génie photographique: le coup d’œil et l’art et le désir de raconter quelque chose qui ait du sens. Tout les deux sont demeurés longtemps inconnus et incompris.
Il y a dans leurs clichés cette humanité, cette sensibilité, cette intelligence de l’autre qui lient le photographe et son sujet. Curtis aime les indiens. Il ne les photographie pas seulement comme des spécimen, des phénomènes de foire ou des mannequins.
On le sent désireux de beauté, non de folklore, de beauté intérieure et de saisir l’âme de ceux qu’il regarde et fixe sur la plaque. Tout cela à une époque où «le seul bon indien est un indien mort», au mieux un va-nu-pieds famélique, fainéant et alcoolique, ou pire, le faire-valoir «objetisé» du bon blanc civilisateur.
 
 
 
 
 
 
Ma préférée!!!
Quand j’étais môme, grand lecteur de Fenimore Cooper et des ses Mohicans ultimes, je ne parvenais jamais à me complaire dans la peau du cow-boy. En conséquence de quoi, volontairement cantonné au rôle de l’Apache ou du Sioux de service, je finissais toujours mal durant les récréations, ce qui m’importait peu d’ailleurs. Toutefois –et ce fut là l’un des ressorts d’un tempérament frondeur et rebelle- je compris rapidement qu’il y avait quelque chose de louche dans les triomphes programmés de John Wayne, de cette Amérique à si parfaite bonne conscience et que les choses ne pouvaient être si simples.
Ce fut le film, magnifique, de John Ford, «La prisonnière du désert» qui me délivra pour la première fois de la naïveté, et de l’illusion que le genre humain était intrinsèquement bon. A partir de là, ce fut comme le bout de laine qui dépasse: on tire, on tire, et tout vient, déconstruisant le beau pull-over.
Et puis il y eut «Hombre» avec Paul Newman, puis «Little Big Man», «Danse avec les loups», «Cœur de tonnerre», «Phoenix Arizona» et tout le toutim, jusqu’au récent «Même la pluie» de Icíar Bollaín (qui se passe au Brésil).

Mais mon préféré, parce qu’il rend compte d'un humour indien fort à mon goût, c’est «Dance Me Outside», 1994, de Bruce McDonald. Un film qui se refuse au piège du misérabilisme ou de la pleurnicherie et peint les amérindiens contemporains dans leur réalité prosaïque.
Sans doute que Edward Sheriff Curtis aurait également aimé les photographier…
Xavier KLEIN

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Que voici un article bien interressant.Mais ou est donc passé l'enfant que vous étiez?Si les indiens tuaient les bisons pour se nourrir et se vêtir bref pour assurer leur survie ils ne se seraient jamais abaissés a torturer l'animal dans un combat organisé de toutes pièces.Ils rendaient grâce a mère nature pour chaque animal qu'ils prélevaient.Ils ont vu les bisons massacrés par l'homme blanc a des fins tant commerciales que de vanité qui faisait des cartons pour le plaisir laissant la bête pourrir au soleil un peu comme le font les taurins d'aujourd'hui qui torturent et tuent pour assouvir leur soif de domination malsaine.
Castor boiteux.

velonero a dit…

Cher Xavier,
Connais-tu, le très émouvant film "Ishi le dernier Yahi" de Jed Riffe et Pamela Roberts, documentaire évoquant le tragique destin d'un indien, unique survivant d'une tribu californienne totalement éradiquée par les colons?

Xavier KLEIN a dit…

Velonero,
J'en ai entendu parler, sans l'avoir vu.

Xavier KLEIN a dit…

A Castor boiteux,
Qu’il vous est impossible de sortir du jugement sommaire, caricatural et manichéen!
Ces amérindiens dont la culture (et ce qui en reste) me fascine, n’ont pas à être non plus idéalisés.
Comme les copains, ils étaient capables du meilleur comme du pire.
Que savez-vous de leur rapport à l’animal, sinon les poncifs et la vision extatique New Age qui prévaut actuellement?
Je vous enjoins de lire les travaux d’ethnologues pour sortir de vos illusions à ce sujet. Pour ne prendre qu’un exemple parmi d’autres, que faisaient-ils du (et avec) les rapaces dont-ils raffolaient de se parer des plumages? Ils ne les consommaient pas en tous cas, mais les tuaient pourtant, et dans quelles conditions…
Allez vous renseigner sur un autre rituel indien, celui de la Yawar Fiesta dans les Andes, et sur les gentillesses faites aux toros et aux condors…
Et tant qu’à faire, lisez aussi les innombrables relations détaillées des tortures raffinées que les indiens infligeaient à leurs semblables. D’autres hommes, d’autres indiens certes, mais pour vous «cela ne compte pas», puisqu’il ne s’agit pas d’animaux mais d’humains.
Quand à l’extermination des bisons, si en cette matière, comme dans les autres, vous connaissiez le sujet, vous n’affirmeriez pas qu’ils ont été massacré pour des raisons «commerciales, de vanité ou de plaisir», mais selon une planification politique impérialiste délibérée des divers gouvernements US depuis Andrew JACKSON («Indian Removal Act», 1830) à l’inique «Indian Appropriation Act» d’Ulysse GRANT (1871) en passant par le «Homestead Act» (1862) du très honorable et altruiste … Abraham LINCOLN, en vue d’affamer les indiens des plaines et de les obliger à se soumettre et à abandonner leurs territoires de chasse guignés par les colons, dans le cadre d’un véritable génocide.
http://www.medarus.org/NM/NMTextes/nm_06_03_indiandecline.htm

Si en plus de l’histoire et de l’ethnologie, vous connaissiez le droit français, vous éviteriez en outre votre dernière phrase: «les taurins d'aujourd'hui qui torturent et tuent pour assouvir leur soif de domination malsaine» qui tombe sous le coup de la loi.
Sans compter que la connaissance de vous-même –mais êtes-vous capable de vous regarder avec lucidité ?- vous porterait à discerner le sadisme verbal et le goût de blesser gratuitement qui se cache derrière ces derniers mots.
Je sais, je sais, je suis prétentieux et me réfugie derrière la culture, on me l’a déjà dit !!!

Anonyme a dit…

La Yawar fiesta il semblerait que ce soit d'abord les riches propriétaires terriens d'origines espagnoles qui auraient dans l'esprit des fêtes taurines recréés "chez eux", sur "leurs terres" des sortes de corridas relativement improvisées dont les protagonistes étaient "leurs gens" opposés à une série de taureaux du domaine.Cela en dit long sur les origines purement indiennes de cette pratique monsieur Klein.Et quand bien même ça le serait celà justifie donc des comportements pathologiques régressifs tels que la torture tauromachique actuelle?Oh,vous allez encore me dire que cette phrase tombe sous le coup de la loi.J'oubliais que ceux dont le slogan "il est interdit d'interdire voudraient justement interdire la liberté d'expresion de ceux qui ne partagent pas leurs opinions sur leur passion.
Donc si je suis votre raisonement puisque des tribus primitives torturaient des animaux je peux moi même en toute logique faire de même.Suis-je donc l'être civilisé que je prétends être ou bien suis-je moi aussi primitif.Il suffit simplement d'un minimum de bonne volonté pour s'astreindre a un comportement moral et ethique en surmontant certaines pulsions.Vous mettez votre formation et votre culture d'historien au service de pratiques régressives et voudriez vous en servir comme un argument supreme sur toute contestation,ce n'est guère glorieux.Il est indéniable certe que les bisons furent massacrés dans le but d'exterminer les tribus indiènes mais celà n'en exclut nullement l'aspect commercial et la vanité de certains tireurs qui faisaient des cartons pour le plaisir.L'homme voulant toujours affirmer sa supèriorité et sa suprématie sur tout.
En matière de sadisme verbale et de gout de blesser je pense monsieur Klein que vous vous posez là,relisez vos articles et balayez devant votre porte.
Castor boiteux.

Anonyme a dit…

"Toutefois –et ce fut là l’un des ressorts d’un tempérament frondeur et rebelle- je compris rapidement qu’il y avait quelque chose de louche dans les triomphes programmés de John Wayne,"
Et vous ne comprenez pas qu'il y a quelque chose de louche dans les triomphes programés des toreros?
Castor boiteux.

Anonyme a dit…

il est sympa ce Bastor Coiteux. sympa mais ectoplasmique. par contre , j'ai une angoisse : donde esta Djônpol ? là , au moins, c'était punchy. Un vrai Cuadri réacteur ( In mémoriam Georges Dubos ). je l'aimais bcp, moi ,djônpol. Djônpol, si tu me lis , stp, dis-moi si tu te grattes les couilles encore, un peu. merci.

Algidras de Tragaviudas