Dernièrement, l'évènement taurin important n'était pas vraiment à Dax où Toros y Salsa déployait ses fastes. Il n'était pas non plus en Arles, ni à Nîmes, ni dans quelque ville d'Espagne.
Dernièrement, l'actualité taurine vraiment importante était à Vic-Fezensac où se joue une partie dont les attendus donneront une indication sociologique primordiale quant à une «certaine idée» de la fête.
Dernièrement, l'actualité taurine vraiment importante était à Vic-Fezensac où se joue une partie dont les attendus donneront une indication sociologique primordiale quant à une «certaine idée» de la fête.
Pour ceux qui en ignoreraient encore, la municipalité procédait à une consultation sur le maintien ou la suspension pendant deux ans de Pentecôtavic. Etant entendu que la mesure ne concerne que la partie dyonisiaque de l'évènement, la partie taurine n'étant nullement en cause.(voir les liens ci-dessous).
En dehors du fait que je suis partagé sur la question –certains arguments de part et d’autre me paraissant valides- il n’est pas question ici de se substituer ou de porter jugement sur la libre décision des vicois qui sont les premiers et, insistera t-on, les seuls concernés.
Cette initiative pose un certain nombre de questions qui me paraissent des plus fondamentales en ce qu’elles touchent au sens et au rapport même de la tauromachie d’une part et de la Fête (avec un grand F) de l’autre.
Un rapport complexe et déterminant.
Un rapport également évolutif, dont la mutation devrait interpeller.
Découpler l'une et l'autre n'est nullement anodin.
On sait combien les deux phénomènes interagissent, tant au niveau économique, que -bien plus fondamentalement- symbolique.
Du point de vue économique, les festejos bénéficient de l'environnement créé par un événement plus global. Les corridas ou novilladas «isolées» d'un contexte ont quasiment toutes fait long feu, particulièrement dans les petites localités.
Qui n'a pas ressenti, lorsqu'elles existaient encore, le sentiment d'incomplétude d'une tarde triomphale d'où l'on sortait des arènes pour retomber brutalement dans la banalité du quotidien?
Pour «signifier», la corrida gagne à demeurer le paroxysme et l'accomplissement d'une démarche festive, «l'eucharistie de la messe dyonisiaque» en quelque sorte.
C'est d'ailleurs la problématique posée à Bayonne ou fêtes et corridas peinent à s’accorder. On remarquera toutefois que les corridas de clôture de la temporada dacquoise par exemple, ont réellement décollé lorsqu'on leur a adjoint l'écrin et le faire-valoir de la salsa et de la convivialité des casetas.
Pour autant les évènements concernés bénéficient incontestablement de l'existence des festejos qui leur donnent sens et en constituent le couronnement, et la saveur sans égale.
La plupart des ferias françaises du sud-ouest -pour évoquer ce que je connais- se réduiraient à de tristes beuveries sans l'apothéose quotidienne du rituel taurin. Même et y compris si la plupart des acteurs ne se rendent pas aux arènes. Noël, Pâques, le 1er ou le 8 mai sont des fêtes, même si l'on ne fréquente pas à la messe, les défilés ou les monuments aux morts.
On peut donc appréhender le découplage entre fêtes et corridas, non seulement du point de vue du succès de chacune, mais particulièrement sous l’angle symbolique.
La situation de Vic-Fezensac n'est guère symptomatique dans la mesure ou la cité gersoise représente un cas à part, tout à fait spécifique et hors normes.
Voilà un petit village de 3500 âmes qui se voit promu chaque année au rang de phénomène de société par l'afflux brutal de dizaines de milliers de festayres?
Cet engouement croissant pour des grands évènements festifs répond sans doute à de multiples ressorts. Le besoin grandissant d’exutoire d’une société en crise qui se moralise et se police (à tous les sens du terme) à outrance se conjugue avec l’isolement des individus d’une société émiettée où la communication –y compris virtuelle (internet, etc.)- s’est substituée à la relation humaine.
Pourquoi la multitude -de jeunes surtout- choisit-elle de se rencontrer à Vic, et pour y faire quoi?
Pour «s’éclater» qu’ils disent, ceux qu’on qualifie (ou déqualifie) de cette appellation de «festayre» qui me déplait souverainement.
L’inconvénient, c’est que le dit «éclatage» est devenu une fin en soi, et non le moyen ou la conséquence de la pratique festive.
L’«embuscade», le coup de pied de barrique ou le godet accidentel de trop ont laissé place à l’ingurgitation massive, délibérée, sans subtilité et sans âme au «cul des bagnoles», l’objectif étant de se propulser au préalable et dans les délais les plus brefs dans l’état d’éthylisme avancé que les générations précédentes mettaient plusieurs heures, voire la nuit à artistiquement élaborer.
C'est une triste et vulgaire ingestion de type anglo-saxon ou nordique (la «saturday's party») qui prend désormais le pas sur ce qui était, n'en déplaise aux pisse-vinaigres, un acte culturel et artistique bacchique ou rabelaisien de haute volée (c'est Antoine Blondin qui me l'a assuré...).
Avant l'ivresse était une conséquence, maintenant, c’est une raison en soi et une cause.
On ne boit plus parce qu’on festoie, on parvient à festoyer parce qu’on a bu…
La règle du jeu ayant changé, on comprend très bien que culturellement les indigènes ne suivent pas d’un bon œil cette mutation qui modifie l’esprit primitif de la fête et en quelque sorte le «contrat initial».
D’autant que d’un événement local, géré par des locaux, on est passé à un événement régional voire quasi-national dont nombre d’acteurs ne sont plus originaires du cru.
La multiplication des débits de boisson temporaires dont la gestion est assuré par des «estrangers», qui viennent engranger les bénéfices en n’assumant que bien peu les dépenses, motivés par des considérations principalement pécuniaires est à cet égard scandaleuse.
Il faut être irresponsable voire irrespectueux pour exiger du budget d’une petite commune qu’il assume une telle charge, soit 160.000 euros (11 % des impôts locaux des Vicois) au profit d’une minorité réduite et souvent exogène.
Privatisation des profits et socialisation des pertes, on connaît la chanson, une chanson que moult vicois ont des raisons légitimes de ne pas entonner.
Pour qui et pour quoi organise t-on des fêtes? Voilà le fond de la question!
Pour soi, auquel cas on est dans la culture ou pour les autres, auquel cas on est dans l'économie?
Il n’y a pas de bonne réponse, il n’y a que des choix, respectables quels qu’ils soient.
Verrons-nous la culture ou l’épicerie triompher à Vic?
Réponse ce soir, en direct (http://www.sudouest.fr/2011/09/16/suivez-le-conseil-municipal-de-vic-fezensac-en-direct-501223-725.php), ce qui là aussi me gêne. Est-il souhaitable que les élus délibèrent sous l’œil et éventuellement la pression morale des citoyens?
Encore une fois, je suis sans aucun doute un vieux con dépassé: à la démagogie d’une fausse démocratie directe, je préfèrerais l’exercice de délibérations sereines et distanciées.
Xavier KLEIN
Et aussi pour juger de la qualité de l'info ou plutôt de la désinfo:
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10 commentaires:
Pas d'accord, cher Xavier, avec ton expression "pisse-vinaigre". Il faut vivre certains excès ou y assister pour avoir sur le sujet un jugement nuancé, comme le tien, certes, mais tu sais très bien que des choses insupportables ne peuvent éternellement revenir chaque année sans le risque grave de mal finir.
Et la majorité des Vicois en est consciente et victime.
va y avoir des droits de repro : un Floc gascon et une rondelle de saucisson, un callejon, un sushi au thon, un xylophon, un carafon, des passes en rond, un fin chapon, une tranche de fois gron.
Tout à fait d'accord avec toi Pedrito.
Je faisais allusion (maladroitement sans doute) aux "pères la pudeur" que la moindre ivresse insupporte, ce qui n'est certes pas ton cas.
Le ton général de l'article laisse à penser que je n'approuve nullement ces excès... notamment l'irrespect des autres, les vandalismes, la violence, etc...
parole de vieux de dire "avant on savait boire" de tout temps les rigoles ont accueilli les festayres fatigués ...
oui bon,
il y a plus grave, il y a moins grave.
tout pourrait n'etre qu'un problème de "raison".
etre maire est très dur. y compris pénalement, en ces époques où on pénalise tout.
pour le reste, je ne sais pas, entre ceux qui font 70 pour cent et plus de leur chiffre annuel en cette semaine, tout en se dévouant corps et ame au nom d'une tradition, et le disent, et ceux qui n'en ont rien à foutre et ne le disent pas, justement parce qu'ils n'en ont rien à foutre, il y a les consommateurs qui paient avec le sourire ébahi de celui qui a vécu un moment de rêve.
Je ne dis pas "avant on savais boire", je dis, "avant on buvait différemment".
Et je dis surtout "avant, boire n'était pas un objectif mais une conséquence".
Je suis tout sauf un enfant de choeur. J'ai fait la bringue, je la fais toujours à l'occasion, et il m'arrive toujours de "me prendre des chimares".
Sauf que les choses ont changé.
Avant, on ne buvait pas avant 17, 18 ans, on était refoulé en boite si trop jeunes. Maintenant on voit des gosses de 13 ans en coma éthylique. Ce n'est pas un avis, c'est une réalité.
Avant (dans les années 70) on faisait la fête au vin, au blanc-bulle, à la jacqueline. Maintenant on la fait avec des alcools durs ou du ricard.
Avant, on ne voyait pas comme je l'ai vu plusieurs fois cette année à Orthez (ou je participe à l'organisation des fêtes) ou ailleurs, des adolescentes se déculotter devant tout le monde et pisser dans un caniveau.
Je tiens à votre disposition l'évolution exponantielle sur 5 ans des interventions des secours et l'âge des intéressés durant les Fêtes d'Orthez: c'est édifiant et c'est un FAIT non une opinion...
DE tous temps fossés et rigoles ont acceuillis des "fatigués", mais ni si nombreux, ni si jeunes, ni si "fatigués".
aaaahhhh, j'ai un début de solution pour que don Xav' retrouve ses bonnes soirées d'antan, en tout cas en ce qui concerne sa problémpatique liée à :
"des adolescentes (qui) se déculotte(nt) devant tout le monde et pisse(nt) dans un caniveau."
http://www.cktoon.com/2009/02/25/p-mate-le-truc-pour-les-filles-qui-veulent-faire-pipi-debout/
lalala lalala lalala zim boum !
ludo
autre chose, il me semble bien que les aficionados ont déserté la ville pour goûter aux joies de la campagne environnante dans les chambres d'hôtes, hôtels, gîtes et autres maisons des copains il y a lurette car déjà on disait ne pas vouloir dormpir à Vic pour des raisons de viande saoule et sale, de bruit et tutti quanti.non ?
ludo
Clément, quand les "vieux" disent et déplorent ce qu'ils voient empirer, la crainte qu'ils éprouvent, et de tout ce qu'ils voient évoluer dangereusement, ce sont des paroles de sages, qu'il faut savoir respecter. Depuis la nuit des temps, c'est ainsi, les "vieux" savent beaucoup plus que les jeunes, entre faire la bringue à 20 ans et se défoncer à 13 ans, - pourquoi pas demain à 10 ans- il y a quand même du souci à se faire! Et comme tout arrive, même ce qui était hier impensable.....
Sur un plan plus pragmatique s'ils venaient à la corrida au lieu de boire leur soixante euros quotidien, ça ferait plus d'aficionados...
Un des problèmes de l'alcoolisme de nos jours c'est la teneur en sucre élevée de leurs boissons fétiche like Redbull : le sucre les soutient et si le but est de tomber dans le coma éthylique il faut ingérer beaucoup plus d'alccol qu'avant pour y parvenir.
Ouais on est des vieux cons, Clément, et on t'emmerde : Non, je rigole... jeune ou vieux c'est pas une qualité et un défaut, c'est juste un état où tu seras très vite...
Et puis penser que la parole des "vieux" (ou des jeunes) est forcément disqualifiée c'est aussi con et facile que de boire pour enfin oser parler à une fille.
Mais je reconnais que prendre dans la gueule les arguments pertinents de Xavier le matin à jeun peut être déstabilisant ;-)
On peut toujours boire un coup pour les oublier...
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