Humeurs taurines et éclectiques

jeudi 12 décembre 2013

S'ils vous filment, filmez les!

Barbarella, hommage à FOREST par Milo MANARA
Après une longue période d'impossibilité à écrire, me revoilà à m'essayer à l'exercice.
 
Ce ne sont pourtant pas les sujets de méditation -non transcendantale- qui ont manqué: la tauromachie est en mutation, tant dans ses fondements que dans ses modalités pratiques et cette période s'avère difficile à négocier, surtout chez nos cousins ibériques.
Le danger surgit tant de l'extérieur (nos «zamis les zantis»), que de l'intérieur où d'une part l'évolution actuelle des spectacles et de leur (manque) de contenu, d'autre part les querelles du mundillo et l'impossibilité en Espagne d'élaborer un front commun, enfin la prépondérance portée à l'argent par rapport au fait culturel alimentent et confortent l'argumentation «zantie».
Nous y reviendrons dans un prochain article.
La France est bien mieux lotie, notamment le Sud-Ouest où prédominent largement les organisations municipales ou associatives. La corrida s'y assume avant tout comme un fait culturel et identitaire, ce qui explique non seulement le consensus des aficionados, mais également et surtout le sérieux dont nous créditent envieusement nos amis espagnols.
 
Le discours français sur la corrida s'est homogénéisé, notamment par l'évolution tardive mais bien réelle d'André Viard depuis 2 ans, sur les fondements taurins. Certes, il n'y a pas eu de mea culpa chez l'ex-grand prêtre de la tauromachie, du toreo et du toro «modernes», mais là n'est pas l'important.
L'important n'est pas qu'avec quelques uns nous ayons eu raison avant les caciques, l'important est que le fond et la forme pour lesquels nous nous battions se soient progressivement imposés comme des réalités désormais incontournables. Un peu partout, les changements dans les cartels, les nouveaux élevages apparus, l'attention développée au premier tercio sont là pour le confirmer. Pour résumer on ne parle plus guère d'ayatollahs ni de talibans...
 
J'ai toujours milité pour une tauromachie diverse, dans laquelle les écoles, les perceptions, les sensibilités puissent s'exprimer, dialoguer, se répondre, s'influencer, se conjuguer. L'évolution actuelle va dans ce sens, et, s'il fallait un symbole à cette état nouveau, le mieux choisi serait cette faena marquante de Morante de la Puebla en septembre à Dax face à un toro de Victorino Martin. Un de ces gestes qui consacrent -s'il en était besoin- un «maestro de verdad»!
 
Toutefois, si les raisons d'espérer se manifestent -je le redis, toujours en France- les raisons de s'inquiéter s'y développent, dont il y a lieu de prendre toute la mesure.
Le changement de stratégie des «zantis» et ses conséquences ne sauraient plus être occultés, notamment par la phalange des «aficionados de tour d'ivoire» qui méprisent avec altitude toutes ces vicissitudes qui ne rapportent pas à leur vision romantisée des campos.
Les attaques -violentissimes- visent désormais les petites arènes qui ne disposent pas des moyens de réponses adaptés.
Les petits ruisseaux faisant les grandes rivières, depuis toujours je postule que la survivance de la tauromachie tient à la solidité des petites plazas: Barcelone est «tombée» parce qu'il n'y avait plus rien autour!
Le vrai peuple du toro porte volontiers béret, parle parfois rocailleux, souvent en gascon, chasse, pêche, tue le cochon et gave ses oies et canards. Il est bien éloigné des uniformisés rouges et blancs qui peuplent les ferias. Fin connaisseur aux mains calleuses, à la réplique prompte, à l'esprit affûté, il se pèle le postérieur en novembre à Saint-Sever ou à Rion des Landes, avant de rissoler sur les tendidos surchauffés de Parentis, d'Hagetmau ou de Roquefort. C'est lui, ce descendant des Tarusates ou autres Tarbelles, les «peuples du taureau» (radical indo-européen *tarb-/*tarv- qui signifie taureau) qui tiendront un jour la première ligne de défense d'une certaine conception du monde, de la vie, de la mort, du rapport à la nature.
 
Les honorables associations «zanties» se dissimulent et sous-traitent désormais leur activisme à des nervis embrigadés et importés de Paris, de Bretagne, de Belgique, d'Allemagne, de GB voire des USA. Ces jeunes gens charmants portant uniformes (comme le 11 novembre à Saint-Sever), cagoules ou capuches (Rion) viennent gambader et se distraire autour de nos placitas avec des ustensiles bien peu champêtres (barres de fer, chaînes, bombes lacrymo, engins pyrotechniques). Chaleureux (ils n'hésitent pas à incendier les arènes de Rion), ils pratiquent une communication directe, certes fondée sur un vocabulaire châtié («enculés», «salauds», «sadiques», «barbares», «tortionnaires», etc.) mais directement compréhensible par les «dégénérés provinciaux» que nous sommes à leurs yeux.
 
C'est sans doute sur ce mode distingué que les chevaliers nordistes de Simon IV de Montfort communiquaient avec les Albigeois, Cortes avec les Aztèques et Bugeaud avec les Kabyles, sans parler des hussards noirs de la République qui ont réprimé les langues régionales en humiliant les gamins qui les pratiquaient. Que voulez-vous, lorsqu'on est fanatique et sûr de son droit, c'est toujours la même chose! Bien sûr, les leaders médiatiques qui poussent à l'acte sans s'y engager parlent un tout autre langage très bisounours: entendre Hély délirer sur la compassion est dans ce contexte un plaisir délectable.
 
Le problème, c'est que pour faire face à ces situations de troubles volontaires à caractère émeutier, les communes concernées sont obligées de mobiliser les grands moyens (services d'ordre, CRS, etc.) ce qui s'avère coûteux et surtout inassumable par les budgets locaux.
On pourrait d'ailleurs envoyer les factures … salées à ceux qui n'ont de cesse de glapir à l'encontre des soi-disant subventions publiques qui irrigueraient généreusement la tauromachie. Ces déploiements entraînent des choix: à Orthez lorsque 50 gendarmes sont requis durant un jour, ils manquent ailleurs, notamment pour couvrir la sécurité des autres jours de fêtes. Il ne s'agît donc ni plus ni moins que de gestion de la sécurité publique de base.
 
Le problème également, c'est que si dans le cas des hooligans les désordres se produisent DANS les stades par des SUPPORTERS, dans le cas des «zantis», les manifestations des «zantis» se produisent la plupart du temps HORS des arènes par des OPPOSANTS.
 
Le problème enfin serait de savoir si la puissance publique admettrait de même, des manifestations de ce type organisées par des libre-penseurs devant et dans des églises, temples, synagogues ou mosquées, des royalistes devant et dans l'Elysée, le Front de Gauche devant la statue de Jeanne d'Arc le 1er mai, des antimilitaristes le 14 juillet à l'Arc de Triomphe, etc.
 
Les guerres picrocholines entamées par les «zantis» -car n'oublions pas que dans cette affaire, il y a des agresseurs en série et des agressés systématiques- se déplacent également sur le plan juridique. Les actions en justice (plaintes, référés, etc.) se multiplient et les juristes qui y ont paré jusqu'à présent l'ont fait gratis pro deo, une situation qui ne saurait durer, d'autant que ces dossiers exigent urgence, temps et moyens. Des juristes que les petites communes n'ont pas les moyens de mobiliser.
 
Plus grave est l'occupation du terrain médiatique par les «zantis» qui se victimisent alors même qu'ils provoquent une confrontation dont ils espèrent tirer profit. La stratégie est désormais patente: provocations, insultes jusqu'à l'exaspération d'un aficionado qui sera filmée et largement exploitée par la suite. Réseaux sociaux et images sont largement exploités et il n'est nullement indifférent que la presse télévisuelle nationale ait largement utilisé pour illustrer ses reportages des images exclusivement fournies par les «zantis».
Dorénavant, les moyens employés, dans le fond comme dans la forme, n'ont plus grand chose à voir avec l'amateurisme d'antan. Ce sont quasiment des techniques d'intox, de «guerre psychologique» et de guérilla urbaine qui mobilisent des groupes extrêmes organisés, motivés et surtout entraînés.
 
Par delà, c'est toute une dialectique de l'HUMILIATION qui est mise en œuvre. Pour preuve ces «haies de déshonneur» particulièrement explicites qui rappellent douloureusement le supplice des verges où le condamné devait traverser une double haie de bourreaux qui l'insultaient et le fustigeaient. Une pratique initiée dans les légions romaines, perpétuée à coup de baguettes à fusil dans les régiments de l'Ancien Régime (notamment en Prusse où elle est demeurée en usage jusqu'en 1870) et portée à son aboutissement par les unités SS à grands renforts de schlague sur les malheureux juifs des ghettos (évidemment, je ne compare nullement le statut de ces derniers avec ceux des aficionados ou celui des «zantis» avec les SS, mais seulement la volonté explicite d'humilier).
 
A cette nouvelle conjoncture, il convient d'apporter des réponses adaptées et de passer du «bricolage» (le mot n'a rien de péjoratif pour ceux qui ont œuvré bénévolement) à une professionnalisation accrue de la réplique.
Si un consensus semble commencer à se créer dans l'afición quant à la nécessité d'une réaction significative, si lors des assemblées de l'A.C.O.S.O. (organisateurs de corridas et novilladas du Sud-Ouest) et de l'U.V.T.F. (Union de Villes Taurines de France), le thème s'est imposé, il reste à déterminer les contingences. Autrement dit: qui fait quoi et comment?
QUI? La question étant avant tout financière, il s'agit de savoir quelle est l'instance la plus à même de lever des fonds. L'A.CO.S.O.? Pourquoi pas, mais elle ne réunit que les organisateurs du Sud-Ouest! L'U.V.T.F.? Si elle apporte la caution du politique, elle ne dispose pas en l'état des fonds propres, ni de la possibilité en l'état de les réunir?
QUOI? C'est la mise en place d'un réseau de juristes professionnels spécialisés et disponibles pour informer, conseiller et plaider, offert à toutes les plazas, notamment celles qui ne pourraient y recourir par leurs propres moyens internes. C'est également le recours à des spécialistes de la communication. C'est enfin contrecarrer le lobbying effréné des «zantis» soutenus par le «complexe animalo-industriel» (soit de 4,5 à 5 milliards d'euros de chiffre d'affaire annuel).
COMMENT? Tout cela suppose un budget dont il conviendra d'évaluer l'ampleur. De même que devront être mis en place des instances et des mesures de contrôle de l'exécution de ce budget. Des idées diverses ont émergé, dont la plus opérationnelle serait un pourcentage des recettes (0,5 à 1%???).
 
En attendant, l'afición dans sa globalité pourrait se préoccuper de s'investir d'avantage surtout en ne laissant pas le champ libre aux «zantis».
 
Quoi faire?
D'abord, autant que possible, garder son calme et ne pas céder aux provocations.
Ensuite occuper le terrain en répondant -toujours sereinement- dans les rubriques commentaires de tous les articles de presse portant sur la tauromachie, systématiquement envahies par les «zantis» pour donner à croire qu'ils sont majoritaires.
Prendre contact et développer les relations pour créer un front commun, expliquer à d'autres secteurs de la ruralité que si nous sommes la cible principale, eux aussi sont dans le collimateur (éleveurs, gaveurs, chasseurs, pêcheurs, etc.).
 
Comme évoqué plus avant, parmi la panoplie des armes médiatiques utilisées par nos adversaires, il en est une qui a fait des ravages sans que quiconque dans l'afición ne paraisse songer à la retourner contre eux: l'IMAGE. Tous les reportages réalisés par les medias régionaux ou nationaux ont utilisés à l'envi des images (photos ou vidéos) issues (et manipulées) par les «zantis». On y voit les pauvres bêtes gazées, déménagées, parfois matraquées. Ou bien de dignes vieillard(es) bousculé(e)s, des jeunes femmes malmenées (après leur crise d'hystérie), leur progéniture pleurer (après avoir gentiment traité les gens de mots doux lors des haies de déshonneur), etc.
Bien évidemment la caméra filme toujours dans le même angle: tournée vers les vilains aficionados et les méchantes forces de l'ordre, et toujours après avoir charcuté au montage l'«indésirable».
La réponse semble évidente: s'ils vous filment, filmez les!
Xavier KLEIN


16 commentaires:

Clément a dit…

Trêve d'anti !!! dis nous plutôt les ganaderias pour Orthez 2014 !!?

Anonyme a dit…

Je suis bien content de te trouver en une telle forme.
el ubano

jeanmi a dit…

Une prise de conscience qui reste malheureusement subsidiaire pour certains aveugles.
Quant à les filmer, j'ai essayé de le faire à Mimizan ou à Dax. La maréchaussée présente me l'a interdit, laissant aux seuls zantis le monopole de le faire.
Mais, oui, il est grand temps que nous passions à la vitesse supérieure, notament auprès des medias.

Anonyme a dit…

Quel bonheur d'ouvrir à nouveau cette page et d'y lire ce texte juste et posé.
Cela fait du bien car la prose des antis tous les jours c'est comme le hamburger, ça finit par gaver et en plus ça ne varie pas beaucoup et devient de plus en plus indigeste, voire même à gerber (tu dois avoir un autre terme plus literraire!! )
Donc surtout ne lâche rien,et ce qui est certain, c'est qu' ils auront peut être contribué à ce que l'on se fédère davantage pour défendre cette tauromachie que l'on aime tant.

Anonyme a dit…


Bienvenido Xavi !
La Lidia ! la Lidia..!..pour Tous et dans Tous les domaines !
Vaya Morante..Matématicas..hé'Vidente-Tio !!..LA preuve par Cuatre !

Salud y Felices Fiestas.
Ernesto viejo

Anonyme a dit…

C'est vrai qu'il est bien plus facile de photographier depuis le callejon des aficionados qu'on aime pas, des braillards, des mulets, des Manfredi, de publier les photos sur des blogs minables en masquant grossièrement les yeux pour ne pas risquer quelques plaintes ou quelques claques, d'inventer une histoire à dormir debout, de cracher sur des gens qui vous ont aidé à un moment donné et au final se faire une belle virginité.

Les antis c'est autre chose, contrairement à ce qu'un chroniqueur de SO a pu écrire après Orthez en 2013.

JPc

Anonyme a dit…

Nous irons jusqu'au bout, nous sommes nombreux, nous sommes légion ! L'état ne pourra couvrir bien longtemps un jeu sadique pour une poignée de pervers, qu'on se le dise !

Anonyme a dit…

Dis moi pèpère t'as fait un stage a Vieux Boucau?Ca m'en a tout l'air.Il va falloir revêtir masque et bottes pour patauger sur ton blog.
Il faudrait peut être expliquer a qui profite le crime quand un incendie est photographié comme par hasard par un aficionado qui se trouvait justement là au bon moment et qui diffuse sa photo sur facbook.Je vous signale que les manifestants sont masqués pour se protéger des lacrymo de la répression des forces de l'ordre a la solde de l'état complice.Les fumigènes ne sont pas des armes mais servent dans les manifs syndicales aussi.Barres de fer?Bien voyons pourquoi pas des flingues?Comment expliquez vous les insultes et les coups envers un caméraman de France 3 a Rodilhan?Comment expliquez vous que l'aficion ait fait plusieurs blessés contrairement aux manifestants?
http://www.youtube.com/watch?v=jE7k7i8vu30
La haie de désonneur vous indispose?Il va falloir vous y habituer les actions vont se multiplier et si la temporada 2013 fût chaude celle de 2014 sera brulante.
Hervé Bruneau.

Anonyme a dit…

Pourquoi ne vas-tu pas "patauger" dans la m.... de tes sites ?
C'est incroyable! Pour qui se prennent ces voyous?

Anonyme a dit…

"Pourquoi ne vas-tu pas "patauger" dans la m.... de tes sites ?
C'est incroyable! Pour qui se prennent ces voyous?"

Voyou??Dis moi donc Anonyme pour qui te prends tu tôi qui dissimule ton identité?Si défendre la vie et le bien être des êtres vivants animaux ou humains c'est être un voyou alors j'en suis fier!Je salut ton courage toi qui aime voir les "combats" depuis le mont Pagnote!
Hervé Bruneau

Anonyme a dit…

Xavier,
Pourquoi ne pas donner la viande des Toros combattus dans les arènes à des associations en charge de personnes en difficulté économiques ou sociales ou à des oevres caritatives?
Jusqu'à preuve du contraire la viande reste comestible...

Xavier KLEIN a dit…

La viande des toros combattus est vendue (et participe de l'équilibre financier).
Elle est d'ailleurs très prisée des amateurs, résultant souvent -surtout à Orthez- d'un élevage naturel et extensif.
Moi-même, bon an mal an j'achète mes 20 kgs de daube (conserve) et mes 5 kgs d'entrecôtes.

Anonyme a dit…

C'est amusant comme les antis reprennent les références bibliques des puritains américains sans même s'en rendre compte, à mon avis ce ne sont que des gamins incultes ou de pauvres hères qui cherchent un combat et trouvent dans leur cause un sens à leur vie, allez anonyme n'hésiter pas à lire la bible!

Wilfrid Lefebvre

Xavier KLEIN a dit…

Oui, Wilfrid,
J'avais remarqué également le "nous sommes légion", grand classique des films d'exorcismes et très mélodramatique.

Anonyme a dit…

Wilfried monte sur ta bécane et vas voir Patricia Blaise tu sera mignon.Si le spectacle de bovins ensanglantés te permet de te sentir exister et de trouver un sens a ta vie c'est peut être que le jour de la distribution de la consciencetu étais parti pisser!
Hervé Bruneau

Bernard Grandchamp a dit…

Mon cher Xavier,

Quel bonheur déjà de te lire à nouveau !... Combien de fois suis-je passé par ici, et tant d'autres aussi j'en suis sûr, en trouvant porte close depuis quasiment fin août...
Enfin, te retrouver "sabre au clair", c'est super !... Et savoir en sus, depuis quelques heures, qu'Orthez 2014 sera de nouveau portugais (en souvenir et en l'honneur de ce grand millésime que vous nous avez offert en 2012!), c''est assez pour passer le cap du "bout de l'an"...
Abrazo fraternel - Bernard "Largo campo"