Humeurs taurines et éclectiques

mardi 25 décembre 2012

Hely hélas!

Toujours à la pointe (acérée) du progrès, l'inénarrable Thierry HELY, «chargé de communication» du CRAC BOUMHUE anti-corrida (à moins que ce ne soit la FLAC ou autre PETA'S), m'envoie ce jour ce petit dessin sous l'aimable exergue «Bon Noël tout de même».
Ce garçon maîtrise admirablement l'art de tendre les verges pour se faire battre.
Bien évidemment, je n'ai pu résister à l'envie de répondre...
«Faudra aussi prévoir une cellule d'aide orthographique, Monsieur HELY mité: l'aide psycologique étant de meilleure qualité quand elle est psycHologique pour les victimes (et non les victimmes).
Et tant qu'à faire une cellule d'aide taurine: on n'achève pas les toros d'un coup d'épée dans la nuque.
En fait une cellule très renforcée d'aide éducative et culturelle pour le dessinateur et l'expéditeur serait plus simple et plus pertinente!
On ne peut pas à la fois être «zanti», intelligent et cultivé, ce serait trop demander...
Bon Noël tout de même.»
Xavier KLEIN

mercredi 19 décembre 2012

L'animalisme ne garantit nullement de la barbarie


Il paraît qu'il traine un rapport d'une docte assemblée de psys «zantis» en tous genres qui assure que la corrida est nocive pour l'enfant, développant chez lui violence, agressivité, insensibilité, perversion, etc.
Sans doute pour être aussi catégoriques et péremptoires, ont-ils copieusement «divanisés» la totalité des mioches s'étant rendus aux arènes ces dernières années. Ce dont on peut toutefois douter...
On en trouve d'ailleurs tout autant, et tout aussi savants qui prétendent le contraire.

Il y a les opinions et il y a les faits.

A ma connaissance, on ne connait pas d'aficionados, et encore moins d'aficionados de 20 ans, responsables de la mort de 27 personnes dont 20 petits enfants.
Par contre, on connait plusieurs grands «zamis des zanimaux», responsables du massacre de millions d'êtres humains: Heinrich Himmler, Hermann Goering (promoteur du Tierschutzgesetz, la loi nazie de protection des animaux, http://bregaorthez.blogspot.fr/2009/05/nazisme-et-animalisme-1.html) et leur mentor, le cher Adolf, qui poussa son immense compassion jusqu'à faire empoisonner sa chienne Blondie, quelques heures avant d'en finir lui même, pour ne pas la laisser subir les avanies des popofs. Lui même était un végétarien convaincu.

Depuis l'abominable tuerie de l'Ecole Primaire de Sandy Hook à Newton, le 14 décembre 2012, on sait aussi qu'un jeune vegan de 20 ans, Adam LANZA a pu se laisser aller à quelques taquineries. Un garçon très équilibré qui ne parlait quasiment pas aux humains mais adorait les animaux.
Monsieur Russ HANOMAN, intime de la famille précise même: «Adam était très moral, il était végétalien. Il ne pouvait pas concevoir de tuer un animal pour le manger. Du coup, je me demande d'où a pu lui venir toute cette violence?»

Je suis parfaitement persuadé qu'il est aussi stupide de créer des relations de cause à effet dans un sens que dans l'autre. Pour autant, j'ai déjà fait souvent remarquer et souligné dans la Brega combien l'animalisme était sous-tendu chez nombre d'adeptes par une détestation de l'humain et par une violence bien réelle, bien que déniée.
Oui, là est la grande question: d'où a pu venir toute cette violence?
Moi, je ne me le demande pas, nourri au sein de la culture méditerranéenne, de la tragédie grecque, de la mythologie, je sais qu'elle est là, inhérente à la nature profonde de tout être humain, quel qu'il soit. Et pour moi, savoir l'identifier en soi et chez les autres, apprendre à la regarder, à la gérer, à la canaliser, à la sublimer par des rituels tels que la tauromachie est le moyen que les peuples du sud ont trouvé par leur culture pour lui éviter de s'épancher comme chez nos amis tellement bien sous tous rapports d'Outre-Atlantique.
Aux States, on n'a pas la corrida, mais on a le Peta ou l'A.L.F., on ne maltraite pas les animaux, on bouffe pas de foie gras, on préfère massacrer les gosses...
Et ce n'est pas un cas isolé. On notera que si la plupart de ce type de massacres se sont déroulés depuis 1998 aux USA, au Canada et dans l'Europe du nord, aucun n'est intervenu en Espagne, au Portugal et dans le sud de la France.
Je laisse au lecteur le soin de tirer les conclusions et de décompter les morts.
Messieurs et mesdames les donneurs de leçons animalistes, il est certains arguments qu'on ne pourra plus accepter d'entendre.
Xavier KLEIN

24 mars 1998: Dans l'école de tir de Jonesboro, deux enfants de 11 et 13 ans tuent 4 étudiantes et un professeur et font 10 blessés
21 mai 1998: Tuerie du lycée de Thurston : un homme tue ses 2 parents, puis 2 de ses camarades dans son école et fait 25 blessés. Il est arrêté par l'un d'entre eux et remis à la police.
20 avril  1999: Fusillade du lycée Columbine: deux élèves de 18 et 17 ans tuent 12 élèves et un professeur, et font 24 blessés, puis se suicident.
21 mars 2005: Tuerie de Red Lake High School, un homme tue 9 personnes et fait 12 blessés, il meurt aussi.
2 octobre 2006: Dans une école amish de Nickel Mines, un chauffeur routier tue 5 élèves, puis se suicide.
16 avril 2007: Fusillade de l'université Virginia Tech: un homme tue 32 personnes et fait 29 blessés, il meurt aussi. C'est la plus grande fusillade qui n'ait jamais eu lieu sur un campus américain. Quatre ans plus tard,au même endroit le jeudi 8 décembre 2011, une nouvelle fusillade fait 3 victimes, dont un policier.
14 février 2008: Fusillade dans la Northern Illinois University : un homme tue 5 personnes et fait 16 blessés, puis se suicide.
16 octobre 2008: Fusillade sur une pelouse d'une école primaire à Detroit, une personne est tuée et 3 autres sont blessées
26 octobre 2008: Fusillade dans un campus de l'université de l'Arkansas, une personne tue 2 personnes et fait un blessé, puis est interpellée
2 avril 2012: À l'université d'Oikos: un homme tue 7 étudiants d'origine coréenne et fait 3 blessés, puis est interpellé
14 décembre 2012: Tuerie de l'école primaire de Sandy Hook: un homme de 20 ans tue sa mère avec laquelle il vivait, puis tue 26 personnes dont 20 enfants et fait 3 blessés, puis se suicide.

samedi 15 décembre 2012

Une guerre de retard ou le syndrome de la bande molletière



La France, pays foncièrement conservateur, en dépit de la sempiternelle célébration de ses mythes révolutionnaires, s’est fait une spécialité nationale d’être toujours en retard d’une guerre. Sous le couvert d’une histoire qu’elle s’est ingéniée sans cesse à écrire ou réécrire pour se persuader de sa grandeur, de sa légitimité et de l’universalité de son message, le XXème siècle, mis à part quelques innovations de l'ère gaulliste, est la pitoyable succession des rendez-vous ratés et des guerres de retard.

1914-1918? Une atroce boucherie où l’on a compensé par la débauche de chair à canon l’incompétence, l’impréparation, le retard technique et intellectuel de nos élites militaires (Merci Monsieur le Général Nivelle). On a trompeusement sauvé la mise grâce à l’intervention des Ricains et de leurs chars.
Quand les fridolins portaient un feldgrau salvateur, on en était au garance, puis au bleu-ligne bleue des Vosges et aux bandes molletières si tellement pratiques.
1939-1945? Rebelote! Déroute, puis soumission totale. 10% de salauds qui collaborent, 10% de héros qui se révoltent, 80% de français moyens qui tentent de survivre et pour qui le mot résister s’efface devant la course au marché noir pour boulotter.
Puis la victoire des anglo-américains... avec leurs supplétifs français.
La France combattante: mon cul! Quelques insurgés, fortes têtes, idéalistes, poètes et baroudeurs à célébrer comme il convient (et il ne convient jamais assez!), d’autant qu’ils furent plutôt rares et la contribution inestimable des troupes dites indigènes!
On était toutefois passé du bleu horizon au kaki, tout en conservant les si tellement pratiques bandes molletières.
Rien qu'à voir les uniformes allemands et français on pouvait deviner qui remporterait la Bataille de France!
«Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts» claironnait Paul Raynaud en 1939, quand un autre génie bien français avançait fièrement: «La poche est colmatée» quand l'avant garde allemande traversait la Loire.
Doulce France...
 Passons pudiquement sous silence les légers ratés de l'Indochine et de l'Algérie, dont nous fument légitimement boutés, sans que beaucoup aient encore compris pourquoi...

Evidemment lorsqu’en matière d'histoire comme en matière de tauromachie on se contemple sans cesse l’ombilic et qu’on tient la chose pour la plus magnifique qui soit, on s'évite de reluquer celui des autres!!!
A s’épargner d’ouvrir les yeux sur le vaste monde, on persiste à mariner dans les remugles de sa caverne en prenant les ombres du feu pour des réalités absolues.
Cette réalité existe aussi en tauromachie...

Tout le monde glose, tout le monde y va de son commentaire (y compris votre serviteur, cela va de soi), tout le monde distille son avis éclairé, comme de bien entendu. Cependant, comme Dirty Harry, l’Inspecteur Callahan le remarquait très crûment : «Les avis c’est comme les trous du cul, tout le monde en a un.» («La dernière cible») .
La prolifération des avis autorisés ne me dérange en rien. Ils font même partie des charmes discrets de la démocratie et s'ils ne peuvent faire de bien, en général, il ne font guère de mal.
Le seul léger problème dans l’affaire, c’est qu’au bout d’un moment, les plaisanteries les plus courtes étant les moins longues, il s’agirait quand même de prendre conscience de qui dit des conneries depuis des années, de qui les met en pratique, et de qui, finalement avait raison, histoire de se prémunir préventivement des couillonnades présentes et à venir.
En d’autres termes: les cons et autres talibans bien inspirés d’hier ne deviendraient-ils pas les sages d’aujourd’hui?

Actuellement, la mode est à l'annonce ça et là de grands bouleversements!
Après la sauterie apocalyptique prévue le 21 décembre à Bugarach (Aude), vous allez voir ce que vous allez voir en 2013,  nomdediiou!!!
On «aurait compris le message», on «aurait pris la mesure de la situation», on «ferait assaut d’imagination», on «programmerait un mano a mano Fandiño-Perera con guarnición de Fuente Ymbro», voire innovation suprême on se battrait pour la grâce insigne d'alternativer Juan Leal !!!

Putaingue, la révolución culturelle!
Les gardes rouges aux portes des arènes!
Les gourous d’hier honteusement exhibés aux prolétaires, en chemise, la corde au cou et bonnet d’âne!
Casas, Margé, François Guillaume et consorts expédiés en camp de rééducación!
6toros6 transformé en organe du peuple du toro!
Les dazibaos vengeurs affichés dans les patios de caballos! Arevalo et Viard condamnés à l’autocritique avant de porter la cangue!
Ca va chier les mecs et mectones!!! Et ça va saigner dans les ruedos, et pas que de la sanguette de bovidé! Du raisiné millésimé de mundillocrate!
Tout cela ne serait-il pas aussi vain que de demander à Hollande d’aller manifester en jean’s et foulard rouge à Florange en faveur d'une coopérative ouvrière nationalisée ou à Sarkozy de se taper une tête de veau-beaujolais sans sa rolex et sa gonzesse au routier des «Copains Réunis»?

L’une des petites choses que la vie m’a enseignée, c’est que l’on ne se bat bien que pour ce en quoi l’on croit, et qu’il est inutile et fallacieux d’exiger qu’un loup se mute en brebis, qu’un énarque devienne humain ou qu'une empresa de plaza de 1ère ait une afición inspirée.
Ce n’est pas de leur faute, il ne sont pas «étudiés pour»…

La mutation salvatrice que tout le monde espère ne peut être réalisée par ceux là même qui, non seulement ont créé la situation actuelle, mais ont résisté bec et ongles à son évolution jusqu’à ce que les réalités s’imposent.
Comment des caciques mundillesques aussi compromis avec un système qui les a produits, qui les a nourris, qui les a formés, qui les formatés peuvent-ils concevoir et mettre en œuvre une «autre voie»?
Comment rompre avec des amitiés, des pratiques, des affects aussi profondément imprégnés?
Comment, lorsqu’on est cul et chemise avec Figuro le Magnifique, lui imposer –ou même lui exposer- les vérités fondamentales qu’il se refuse à admettre, parce que ce n’est ni sa structuration intellectuelle et culturelle, ni son intérêt?
Je radote? On a récemment vu l'innocuité, l’échec révélateur de certaine lettre ouverte à un certain Julián López Escobar et l’autisme manifeste de l’intéressé.

Entendons-nous bien, ce n’est pas que nos bonnes et braves élites taurines soient stupides, aveugles ou intrinsèquement malhonnêtes, c’est qu’elles ne sont pas programmées pour, c’est qu’elles pâtissent d’une impossibilité structurelles à penser «autre».
Pourquoi?
Parce que leur métier, qui est un métier de pouvoir, les contraint à la réponse et non à la question, parce que conduits à FAIRE, il sont devenus inaptes à la PENSEE critique.
Parce qu’ils vivent la remise en cause de ce qu’ils FONT, comme une remise en cause de ce qu’ils SONT.
Ce qui peut être un atout (foncer et réaliser) est également une malédiction.
Nous en sommes tous là, mais certains plus que d’autres.
Cette parano, c’est la maladie des décideurs de tous poils, qu’ils soient politiques, économiques ou artistiques, une maladie difficile et très douloureuse à combattre car le seul remède efficace c’est le DOUTE et la remise en cause, et que peu en supportent l’exercice.
Peut-être ces symptômes résultent-ils d’une évolution sociétale où, depuis des lustres, on a privilégié la performance et son accomplissement à l’analyse et au regard plus subtilement humaniste.
Où sont passés les caciques d’antan, les Manolo Chopera et consorts, passés par la discipline des «humanités» avant d’apprendre le jeu impitoyable des requins? Ils parvenaient eux à équilibrer et à conjuguer leurs intérêts bien compris avec une afición indéniable.

Le mal de notre époque, c’est également l’a-culturation ou la déculturation, au choix. La culture est même devenue une infirmité, un handicap, un motif de raillerie, une accusation implicite de préciosité, de prétention ou de supériorité, comme ces bons élèves de nos classes que leurs copains traitent d'«intellos».
On compense la paresse intellectuelle d’aller écouter une conférence, de lire le Cossio ou les dizaines d’ouvrages passionnants (souvent en espagnol malheureusement) par le suivi scrupuleux de Tendido 000, des «news» de Mundomachin, etc qui font figure de connaissance approfondie de la res taurina.

Or, information n’induit aucunement culture.
L’information c’est apprendre que Chopetilla ou Matira s’emparent de telle ou telle arène, que le susnommé Figuro le Magnifique change d’apoderado ou qu’il a coupé 7 oreilles à 2 toros de Victoriano de Domecq dans la Monumental de Los Trouillos, le 30 février.
La culture, c’est non seulement de ne pas s'encombrer excessivement de ces amusettes, mais 20 ans après d’interpréter et de donner un sens à l’ensemble de ces informations en les croisant avec des dizaines d’autres d’ordre politique, sociologique, culturel, économique, etc.

Sans recul, sans analyse solide du passé et du présent, on ne peut accéder à la perspective et encore moins à la prospective. Si l’on ne comprend pas clairement et lucidement d’où l’on vient, où l’on est, pourquoi et comment on y est parvenu, on aura beaucoup de peine à savoir où l’on doit se diriger.
Nous en sommes là…

L’autisme des élites et leur déficit culturel taurin actuels sont tels qu’elles se trouvent pour leur majorité, dans l’incapacité d’élaborer des solutions à la mesure des enjeux.
Vivant et macérant de concert dans leurs cercles avariés et trompeusement rassurants, elles se persuadent de bonne foi que leurs déboires ne résultent que de l’action nocive «des 40 gueulards qui pourrissent leurs corridas».
Ainsi, quand il s’est agi, durant la décade passée, de dénicher des ganaderias toristas pour les grandes ferias, a t-on vu fleurir et prospérer des lots de Victorinos ou de Miuras, voire de La Quinta ou de Conde de Mayalde, ce qui faisait se tordre de rire les authentiques toristas très au fait, eux, du discrédit (qu'on espère provisoire...) de ces maisons au nom illustre.
Pour tomber à côté, on ne pouvait rêver mieux!

Le monde taurin et particulièrement le monde ganadero évoluent vite, très vite, trop vite.
Si l'on veut suivre le mouvement, il convient de se tenir très informé de l'actualité du campo. Non pas des vétilles du torobusiness, mais de savoir la politique des ganaderias à suivre, de celles qui montent, de celles qui «bachent», des changements de sementals, des variations des camadas, des «en forme». Il faut suivre les petits signaux si révélateurs.
Combien d'empresas écument-elles régulièrement le campo?
Combien se hasardent-elles hors des chemins battus et rebattus?
Combien prendraient-elles le risque de sortir des gammes des toros de soit-disant garantie?

Malheureusement, les ganaderos sont aussi des négociants et peu résistent aux tentations: lorsqu'une figura commence à s'intéresser à une ganaderia, ce n'est généralement pas bon signe quant au devenir de la casa. On pourrait citer moult exemples.
Par contre, l'esprit taquin relèvera que les propositions de l'afición (Cuadri, Aguirre, Cebada Gago, etc...) sont rarissimement suivie d'effets. Etrange, n'est-ce pas?
Des maisons sérieuses comme Baltasar IBAN ou FUENTE YMBRO étaient intéressantes, on constate, ne serait-ce qu'en novillada, qu'elles connaissent depuis 2 ou 3 ans une méforme et un affadissement qu'on souhaiterait provisoire. Malheureusement le goût que les figuras leur professe subitement n'engage nullement à l'optimisme.
Là sévit le syndrôme de la bande molletière et de la guerre de retard. C'était alors qu'il fallait les programmer!

Comment remédier?
En ce qui concerne les toros, au centre du débat, il existe des professionnels du campo, les veedores. Des auxiliaires précieux et compétents, pour qui n'est pas au fait, si l'on sait en user, tout en conservant à l'esprit la juste mesure de leurs limites.
Comme les autres mundilleros, ils ont leurs intérêts, leurs faiblesses, et leurs préjugés qu'il y a lieu de prendre très sérieusement en compte. Ils devraient être des ressources, des compléments, des  «plus», nullement des solutions, ce qui n'est malheureusement pas souvent le cas, dans un contexte où l'inculture de nombre de décideurs les porte à s'en remettre inconsidérément à leurs truchements et à leurs arbitrages.
Imprégnés des présupposés des taurinos, des points de vue des toreros, ils peinent à se départir d'idées toutes faites y compris sur la France et l'attente de son afición.
Il n'est pas tant question de divergences de goûts, de vérités taurines, mais bien d'une acceptation d'une demande qu'ils récusent. S'ils vous avancent une définition du toro idéal et que vous leur rétorquez qu'il n'en va pas de même pour vous et votre public, ils ne peuvent l'entendre. Pourtant, il ne s'agit pas de vérités, mais de choix, et en la matière le client a toujours raison ... sauf en tauromachie où c'est le vendeur qui impose ses normes.
Là est le problème...
Et lorsque la dure réalité s'impose, que les aficionados, encouragés par la crise désertent les arènes, contre toute évidence, ils persistent dans l'erreur.
Eux aussi retardent d'une guerre, avec leurs opinions datées et très arrêtées sur ce que doit être «le toro de Dax», «le toro de Mont de Marsan», «le toro de Vic» ou celui d'Orthez.
Ils transposent la réalité des plazas espagnoles, et quand ils ont quelque conscience de l'évolution française, c'est souvent par ouï dire, de manière déformée.
Issus du milieu, vivant dans et par le milieu, en règle générale, la seule vérité qui s'impose vraiment à eux n'est nullement celle des aficionados, mais celle du milieu.
Ceci étant précisé, lorsqu'ils appréhendent correctement les demandes et les enjeux, ils représentent des ressources inappréciables par leurs connaissances, leur savoir, leur discernement.
Les écoute t-on, et les écoute t-on avec les réserves et précautions indispensables, sans naïveté et sans illusions excessives?

La mutation indispensable de la tauromachie sera ardue et périlleuse car peu, surtout les décideurs actuels y sont culturellement préparés: on demande aux décideurs de «l'ancien régime» d'en concevoir un nouveau.
De ce point de vue, ma perception est pessimiste. Il faut malheureusement craindre que nécessitant des Guderians, nous ne disposions que de Gamelins, retardant d'une guerre pour mener victorieusement celle à venir.
Une bête histoire de bandes molletières si tellement pratiques!
Xavier KLEIN

mardi 20 novembre 2012

ARTE DE LIDIAR


Je lisais récemment l’abrégé d’un cours de l’Université San Pablo de Madrid («Elementos técnicos del arte de torear» de Rafael CABRERA BONET, Curso academico 2008-2009, CEU Ediciones) dont l’objet porte sur l’historique de la lidia et son évolution depuis les origines, ainsi que sur les traités ou écrits de toreros, sur la question.

Plusieurs points m’ont frappé dans cette étude, qui peuvent se rapporter à un seul élément central: la raréfaction progressive de ces écrits de maestros sur le sujet depuis les années 80 et la disparition correspondante de toute réflexion et de toute théorisation, de tout descriptif technique sur l’«arte de torear».
Domingo ORTEGA, le seul maestro historique que je regrette vraiment  n'avoir pas vu toréer... 
S’il existe de nombreux «témoignages» ou allusions dans la presse, la littérature spécialisées ou dans quelques hagiographies ou entrevues avec des gloires présentes ou passées, la dernière œuvre marquante traitant exclusivement du sujet est la relation de la conférence donnée en 1950 à Madrid par le maître es-dominio Domingo ORTEGA.

D’où vient ce tarissement d’un genre pourtant jadis fort couru, celui du «traité technique»? Est-ce à avancer que tout a été dit, tout est maîtrisé?
L’un des postulats de base de l’épistémologie (la «science des sciences») repose sur la constatation que toute technique tend à se complexifier en évoluant. La tauromachie obéissant à cette règle, comme toute autre technique, il devrait s’ensuivre un enrichissement progressif des savoirs et savoir-faire qui devrait donner immanquablement lieu, dans notre société de l’écrit (d’autres civilisations procèdent par d’autres modes de transmission) à une production écrite correspondante. Ce n’est apparemment pas le cas. Pourquoi?
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Il est une idée reçue d’origine journalistique et mundillesque qui tend à faire accroire que «l’on n’aurait jamais aussi bien toréé qu’aujourd’hui».
Réalité ou illusion?
Tout dépend ce qu’on appelle «toréer» et tout dépend de «ce que l’on torée».
Pour en revenir aux grands fondamentaux, faut-il rappeler la dichotomie établie depuis plus de cinquante ans par de grands aficionados tels que Bergamin entre le fait de «toréer»et celui «donner des passes»?
On relèvera ensuite la vague de critiques montant de l’afición la plus diverse sur l’insignifiance notoire d’une majorité des toros actuels et subséquemment, la stagnation et l’ennui qui gagne les ruedos.
En conséquence, est-il encore besoin de savoir vraiment «toréer» pour «donner des passes» à ces bestiaux là?
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Je déplorais il y a peu de temps, le comportement de certains toros –notamment lors de la récente «apothéose» nîmoise- en relevant combien leur comportement benoît et collaborateur de soeur de la charité, permettait à peu prés tout et n’importe quoi à ceux qui les utilisent (car il convient ici de parler d’utilisation).
J’entends ça et là évoquer «des toreros qui s’aventurent sur des sitios inexplorés», des «faenas millimétrées», des «compositions créatives» et je me demande à quelle vertu il convient d’attribuer cette tauromachie paraît-il exemplaire: à un toreo surpuissant ou à un toro surdomestiqué?
Eriger, comme les égyptiens antiques, des pyramides à la main,  sans l’usage de la roue, avec le seul et piètre outillage de cuivre relève infiniment plus de l’exploit que de les construire de nos jours avec toute la puissance et la capacité de la technologie moderne, avec des grues, des lasers, des camions, que sais-je. De même, sculpter dans le marbre est autrement plus commode que dans la craie.
Ce sont le défi, l’opposition et l’épreuve qui font la grandeur et le prix de la réussite. Dominer un «grand toro» mobilise obligatoirement toutes les ressources de la volonté, du courage, de l’art et de la technique et demande d’autres vertus et acquis préalables que de réciter son toreo de salon devant le Desgarbado standard.
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La question posée est donc celle de la disparition de la technique parce que devant les toros modernes, la technique n’est plus aussi indispensable.
Idée choquante, présupposé gratuit?
Sûrement pas pour ceux qui fréquentent les novilladas et constatent festejo après festejo, l’indigence du bagage des aspirants contemporains. Dés qu’une difficulté ou un défaut surviennent: toro encasté, gazapón o andarín, querencioso, codiciosomanso, con hachazos o derrotes, etc. nos apprentis ont le choix entre pâtir, capituler ou s’en prendre au gêneur, à sa lignée, au ganadero et en général à ces cons d’aficionados qui exigent des toros qui «ne devraient plus exister».
A ce compte, il serait donc exact d’affirmer qu’«on n’a jamais aussi bien toréé qu’aujourd’hui des toros aussi facile et maniables», mais aussi qu’«on n’a jamais aussi mal toréé qu’aujourd’hui des toros encastés et complexes».
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Tout cela ne pourrait résulter que d’une mode, que d’une défaillance conjoncturelle, que de l’un de ces mouvements de balancier dont l’histoire détient le secret. Malheureusement, il faut craindre qu’il n’en soit rien, car tout cela résulte d’une dégradation à l’œuvre depuis deux décennies.
Et que l'on n'aille pas nous raconter que cette constatation relève d'une vue de l'esprit, d'un malséant recours à la «décadence». Pour peu que l'on s'écarte des «archives de l'excellence», des grands moments filmés et conservés, pour accéder à l'ordinaire des films super 8 des années 60 ou 70 ou des vidéos plus tardives, on touche un ordinaire taurin émaillé de toros qui régulièrement sautent les tablas, de mansos con casta, de têtes baladeuses, de cornes assassines, de toros en querencias, etc. affrontés quotidiennement par des Paquirri, des Viti, des Ordoñez, des Puerta, des Dámaso González et consorts, dont la plupart triaient pourtant leurs ganaderias.

Depuis ces maîtres, la chaîne de la transmission des savoirs et savoir-faire a semble t-il été irrémédiablement rompue et ils demeurent bien rares ceux qui savent encore l’immense patrimoine du noble art de lidier. Et quand bien même voudraient-ils léguer celui-ci, que peu des éventuels récipiendaires seraient en situation et en désir de l’humblement recevoir.
Car pour les jeunes générations, le résultat importe plus que la manière, et le but que la voie pour y parvenir. Si les pèlerins de Saint Jacques de Compostelle comprennent plus ou moins rapidement que «l’on ne fait pas le chemin, mais que c’est le chemin qui vous fait», allez faire entendre à nos jeunes assoiffés de «triomphes» à bon compte que la grandeur naît de l’adversité!
L’essentiel étant devenu de s’embarrasser le moins possible avec des partenaires compatissants et bien élevés, pourquoi s’encombrer des exigences d’une technique devenue inutile puisque si un toro venait par mégarde à la requérir, c’est qu’il serait –pour ainsi dire- l’anomalie, l’anormalité, le vilain petit canard à rejeter impitoyablement de l’espèce?
En outre, il faut considérer combien l’aspect technique demande de travail d’apprentissage, de polissage, de risques et de confrontation en situation réelle. En tauromachie plus qu’ailleurs, la technique s’éprouve et se paie au prix de la sueur et du sang, sans compter bien entendu l’intelligence et des capacités de questionnement et d’auto-évaluation (l’intelligence quoi !) qui ne sont malheureusement pas l’apanage du commun des mortels.
On voit combien, dans la médiocratie contemporaine, on requiert par là des vertus devenues obsolètes pour ne pas dire ringardes.
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Le «toro domecqtiquisé» fonctionne t-il encore selon les canons de la race «brave»?
On le voit désormais charger avec une sempiternelle et inoxydable équanimité dans tous les terrains, et dans toutes les situations: il «passe» et comme les blanchisseuses «repasse» sans que le torero standard dût particulièrement se préoccuper des sagesses du Popelin.
Le drame, c’est qu’il en va ainsi depuis les classes juvéniles, de sorte qu’on peut désormais envisager de faire carrière sans qu’on ait pu jamais être importuné par les mauvaises manières que confère la caste, et par la nécessité d’y remédier. Demandez à Manzanares Junior, il vous expliquera le cursus…
Sans doute est-ce également un problème générationnel, voire sociétal. Celui d’une société où saumon fumé et foie gras sont passés du statut de produits confidentiels et luxueux à celui de produit de consommation quasi courante.
Le luxe de jadis est devenu le commun du présent.
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Il y a une quarantaine d’années, lorsqu’avec les copains nous courions tientas et capeas, l’ordinaire était à ces vaches ou ces becerros blanchis sous le harnois et abonnés à l’exercice. Connaissant le grec, le latin et même le serbo-croate, les aimables bestioles s’intéressaient infiniment plus à nos postérieurs qu’à la muleta qu’on s’évertuait à leur présenter selon les canons. Quand d’aventure un torero confirmé les prenait en main, on voyait immédiatement l’avantage d’une technique éprouvée. Et si, par extraordinaire, pouvait nous échoir un animal «neuf» ou noblissime, on se sentait Joselito, Belmonte et Ordoñez réincarnés. Cependant la chose relevait toutefois de l’exceptionnel et nullement de la normalité.

En tous cas, nous touchions du doigt, dans sa crudité, la difficulté de toréer. La réalité des terrains s’impose d’elle même, on sent d’instinct le refuge des planches et le danger du centre, on appréhende la distance où l’arrancada peut se déclencher, le sitio, on expérimente la difficulté d’adapter le mouvement de la muleta à la vitesse de la charge, de «sortir les bras», de se croiser, de se replacer, de lier les passes, etc. On comprend immédiatement, sans théorie et sans long discours où est son intérêt et où est sa sauvegarde.
Et cela, c’est le becerro qui vous l’apprend, rudement, par des cogidas. Aucunement en se pliant à votre volonté et à vos exigences, mais tout au contraire en les contrariant.
***
La dernière fois que j’ai donné de la muleta, c’était il y a une demi-douzaine d’années, avec des vaches de Jandilla.
Je me suis trouvé fort habile…
A moins -c’est infiniment plus certain- que la bonté naturelle et les dispositions particulièrement bienveillantes de mes interlocutrices y aient trouvé leur part. Ces sympathiques bestioles ne considéraient que la muleta, à l’exclusion de toute autre détail, dont mon physique pourtant rebondi et volumineux.
Avais-je tant progressé?
Nullement, au contraire! Ce sont les vaches qui avaient changé. Des vaches qui par la candeur qu’on exigeait d’elles, ne requerraient plus les mêmes recours et les mêmes précautions qu’antan.
Ce jour là, et tous les jours où je vois ce type de bétail, avec tant de facilité et de complaisance, «permettre», j’assiste à l’agonie de la technique taurine, à la mort de la lidia…
Xavier KLEIN


BIBLIOGRAPHIE succincte et non exhaustive des traités écrits ou inspirés par des maestros:
«Noche phantastica, ideático divertimiento, que demuestra el methodo de torear […]» de Eugenio GARCIA BARAGAÑA, 1750 (http://bibliotecadigital.jcyl.es/i18n/consulta/registro.cmd?id=14629&formato=ficha&aplicar=Aplicar)
«Tauromaquia completa, o sea, el arte de torear en plaza tanto a pie como a caballo» de Francisco MONTES «PAQUIRO», 1836
«La Tauromaquia» sous la direction technique de Rafael GUERRA «GUERRITA », 1896
«El arte del toreo» Domingo ORTEGA, conférence de l’Ateneo de Madrid du 29 mars 1950
«El toreo puro» Rafael ORTEGA, 1986
«La Tauromaquia de Marcial Lalanda» Andres AMOROS, sous la dictée de Marcial LALANDA, 1987
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vendredi 16 novembre 2012

«Grand torero»? «Grand toro»?

«Un héros se révèle dans l'adversité et non dans la facilité.»
«Alexandre et Alestria» SHAN SA


A la réflexion, et après ces discussions si savoureuses qui rythment la vie aficionada, une conclusion m'apparaît de plus en plus évidente dans le débat actuel.
A l'issue d'une faena, si un «grand toro» peut exister sans un «grand torero», l'inverse relève le plus souvent de l'imposture et du battage médiatique.
On parle alors de l'admirable virtuosité de Trucmuchito qui aurait «créé un toro»...
Créer un toro!!! Quelle fumisterie et quel dévoiement des valeurs du combat! Si l'on peut «créer un toro», c'est qu'il n'existait pas, c'est qu'on envisage une tauromachie sans toro, c'est à dire du «toreo de salon» en quelque sorte...
***
Combien en avons nous connu de ces fauves de grande caste, dont les qualités guerrières s'imposaient d'elles mêmes, y compris lorsque les hommes qui les affrontent n'étaient que rarement à la hauteur! Très frustrant d'ailleurs!
Ils sont de ceux dont on prétend qu'ils remettent «cada uno en su sitio» (chacun à sa place). Ils persistent dans la mémoire des aficionados de verdad, alors même que l'on a depuis longtemps oublié qui les avait affrontés.
Je n'ai pas grande mémoire, mais je me souviens bien de ces Miuras de Dax en 1975 ou 76, de ces Yonnet de Saint-Sever, des lots de Fraile de Bayonne, alors que je n'ai plus qu'une faible réminiscence des cartels qui leur étaient opposés. Je revois leur image, leurs charges, leur furie alors que le reste, le visage des hommes, la fugacité des passes, s'est effacé.
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Le nec plus ultra consisterait bien sûr à allier les «grands toros» et les «grands toreros», mais de nos jours, une telle proposition n'a guère de sens. Car si les «grands toreros» actuels -ou prétendus tels- sont aujourd'hui à la place où ils sont, ce n'est sûrement pas à cause des «grands toros» qu'ils auraient rencontrés, mais par le fait bien plus prosaïque des dithyrambes concoctés par des medias spécialisés et d'un public de spectateurs abusés.
Si parmi un G10 en décomposition avancée (Ponce, Morante de la Puebla, César Jimenez, El Juli, El Fandi, Manzanares, El Cid, Perera, Cayetano et Talavante), il se trouvait des maestros qui, jadis, avaient pu se confronter avec des toros sérieux (Ponce, El Cid), pour le reste, aucun des autres n'a vraiment apporté la preuve avérée et répétée -j'exclus les «gestounets» exceptionnels tel le mano a mano de Morante/Le Cid devant des Victorino à Séville- de leur MAÎTRISE devant tout type de bétail, ce qui est pour moi la condition sine qua non pour évoquer une authentique maîtrise.

On peut dés lors gloser à l'infini sur tel qui disposerait d'un sitio fabuleux, tel dont le temple figerait les horloges, tel dont le toreo serait «millimétré», tel dont l'«inventivité» s'affirmerait exceptionnelle et autres facéties envisageables devant tous les Desgarbados du monde. Cependant, jusqu'à preuve du contraire, le véritable exploit s'exerce devant l'impensable et la difficulté maximale.
Le héros n'est pas celui qui fait ce que tout le monde (ou la plupart) peut faire ou rêver de faire, mais celui qui fait ce que nul ne saurait envisager possible. Et la notion d'héroïsme ne saurait faire l'économie du risque, de l'action menée au péril le plus extrême, sans pour autant qu'elle fût déraisonnable.
S'il est prêt à la sacrifier, le héros aime la vie et porte la conscience de l'oeuvre utile, y compris si cette oeuvre n'a d'autre utilité que l'esthétique ou le symbole. Héraclès purge le monde des calamités, Gilgamesh le civilise, comme Perceval quête le Graal, source de vie ou Modigliani consomme ses jours à la poursuite du beau.
Que font d'autre nos modernes titans de l'arène, sinon se garnir la bourse?
Il paraît, à ce que l'on dit, que ces beaux messieurs «pourraient».
Ouais! Un peu comme le grand Sar Rabindranathduval: «Il peut le faire»:

«Tout flatteur vit au dépend de celui qui l'écoute»: cela ne me dérangerait en rien, si tout cela ne participait de la duperie majuscule dont on sait qu'elle ne profite réellement qu'à ceux qui s'en gobergent. Mais tout cela conserve t-il encore un sens quand on se dispense de l'épreuve, quand le mérite ne procède que du vent d'une éphémère et fallacieuse publicité?

En tauromachie, tout vient du toro et tout y retourne.
C'est lui et lui seul l'aune de la valeur et du triomphe. L'été dernier, les publics trop longtemps abusés de Dax ou de Mont de Marsan ne s'y sont pas trompés quand la gloire irréfragable des toros d'Escolar Gil s'est naturellement exprimée, et lorsque les hommes qui les affrontaient surent se hausser à la mesure de l'enjeu.
Il ne saurait exister de «grands toreros» sans «grands toros». Ceux qui aspirent au faîte de l'escalafón (nota: l'échelle) devraient s'en persuader, au risque de réduire l'échelle à un misérable escabeau.
Xavier KLEIN

jeudi 15 novembre 2012

Schopenhauer's trip

Arthur SCHOPENHAUER

«On transmet ce que l'on ignore avec ce que l'on croit savoir.»
«Vie Secrète» de Pascal QUIGNARD

Certains lecteurs s’interrogent et m’interrogent sur les allusions plusieurs fois renouvelées que je fais au philosophe Arthur Schopenhauer, à propos de notre cher ami de Vieux Boucau.
En fait, c’est la lecture attentive et assidue des «zopus» de Terres Taurines et notamment celle d’un éditorial récemment paru qui motive mes taquineries. Notre cher Dédé s’adonne en ce moment à une cure intensive de schopenhaurine, en ignorant sans doute les effets secondaires du produit.

Il n’y a rien de pire que la culture ou l’instruction partielles et non maîtrisées. Elles ouvrent la porte à tous les contresens, à toutes les absurdités, à tous les barbarismes et malheureusement, trop fréquemment, à toutes les barbaries.
Certes, nous nous y adonnons tous plus ou moins, mais certains avec plus d’éclat ou de succès que d’autres.
Alors pensez donc, quand on a affaire avec un champion toute catégorie, on ne peut qu'exceller dans ce domaine comme dans les autres!
Au motif que nous ne maîtrisons pas tout, devons-nous renoncer à nous exprimer? Sûrement pas!
A ce compte qui pourrait prétendre parler?
Toutefois, la Connaissance peut être souvent comparée à un rasoir entre les mains d’un singe et lorsqu’on se préoccupe de choisir un exemple, encore faut-il s’assurer que celui-ci ne vous réserve pas quelque surprise et ne dissimule pas de cadavre dans les placards.
C’est le cas du flirt appuyé Arthur Schopenhauer/André Viard (vous me garderez un produit!). Il n’est rien de plus profitable à notre ermite taurin, que de s’instruire.
Louable intention!
Louable pratique!

Comme le prétend si joliment le proverbe chinois:
«Celui qui sait qu'il ne sait pas, éduque-le.
Celui qui sait qu'il sait, écoute-le.
Celui qui ne sait pas qu'il sait, éveille-le.
Celui qui ne sait pas qu'il ne sait pas, fuis-le.»

Le problème, c’est qu’Arthur n’est sans doute pas le meilleur mentor qu’un défenseur de la tauromachie en général et que Viard en particulier puisse adopter.
D’une part, le Teuton neurasthénique a été l’un des premiers chantres de la compassion animale, jusqu’à instituer comme seul héritier après sa mort son caniche Atma. S'il vivait encore, il émargerait sûrement à tous les mouvements «zantis».
D’autre part, parce qu’il y a quelque ironie (involontaire?) à prendre pour modèle le spécialiste de la dialectique éristique, l’auteur de «L’art d’avoir toujours raison» (sous titre: «et de se faire détester de tous»), dont tout un chacun devrait se livrer à la lecture prompte et approfondie pour déguster les débats politiques en général et réussir son diplôme universitaire de viardologie appliquée en particulier.
Selon Arthur -mais qui songerait à le démentir?- il est intéressant de considérer comme causes essentielles de la dialectique les travers de l’âme humaine suivants:
                    * la malhonnêteté.
                    * la vanité.
                    * le fait de parler avant de réfléchir.
                    * l'obstination dans l’erreur.

On comprend dés lors le coup de foudre du grisonnant gourou pour le pessimiste germain. Tout cela explique beaucoup de choses et l’on pourra conclure avec Jean JAURES:
«On ne transmet pas ce que l'on sait, ni ce que l'on veut, on transmet ce que l'on est ….».
Xavier KLEIN

A lire d’extrême urgence: «La dialectique éristique» ou «L’art d’avoir toujours raison» d'Arthur SCHOPENHAUER
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lundi 12 novembre 2012

zantimails

Quelques petits problèmes avec le blog, ont empêché la mise sur orbite de 3 articles qui avaient été programmés, dont l’annonce du pèlerinage Saint-Séverin. Ces embarras ayant été résolus, La Brega reprend son cours.

Toutes les villes taurines sont systématiquement bombardées de courriels de pression (63 à ce jour), expédiés sur l’injonction de l’Alliance Anticorrida (avec un forte participation de flamands (verts!) de confession belgeoise, comme leur charmant député d’extrême-droite Laurent LOUIS): «Conformément à mon aversion pour la pratique tauromachique je réprouve le fait que ma famille et moi-même, subissions la vue ou l’évocation de spectacles mettant à l’honneur la violence infligée à un être vivant.
Je participe, par conséquent, à la campagne de l'Alliance Anticorrida et m'engage à éviter toutes les villes au sein desquelles de telles manifestations sont organisées.».

Certaines «pointures» jugent bon d’agrémenter la copie standard du galimatias tellement prisé par les «zantis», voire de propos désobligeants et de généreuses bordées d’injures.
Sont-ils joueurs, ces petits canaillous!

Vous connaissez mon esprit taquin, «à force d’à force», les plaisanteries les plus courtes étant les moins longues, je réponds parfois aux plus virulents par le courrier ci-dessous.
Allez savoir pourquoi, ces braves gens n’apprécient pas.
L’humour ne semble pas être une vertu anti-taurine!

On appréciera la bonne nouvelle: s'engageant à éviter nos bonnes cités, sans doute serons-nous enfin débarrassés de leurs manifestations et de leurs avanies... 

«Cher Monsieur, chère Madame,
C'est avec beaucoup de difficulté -mais rassurez vous, nous y parviendrons- que nous nous priverons de votre précieuse présence, et de celle des vôtres que vous semblez avoir converti à votre credo bestialiste.
Au demeurant, parfaitement conscients, mais néanmoins satisfaits de notre état de barbarie et de sous-développement civilisationnel, nous n'en changerions toutefois pour rien au monde.
Nous ne sacrifierons jamais nos convictions, nos valeurs et notre culture au bonheur de vous connaître et accessoirement à la pression et au chantage.
Nous sommes au regret, cher Monsieur, chère Madame, de n'avoir aucun goût de vous ressembler et d'adhérer à votre foi animaliste, fût-elle fanatique.
Veuillez agréer cher Monsieur, chère Madame, l'expression de nos sentiments aficionados.

PS: Pourriez-vous avoir l'amabilité de répandre encore plus largement votre mailing, afin que nous puissions être véritablement assurés qu'aucun de vos pareils ne viennent inutilement s'aventurer sur nos terres taurines»

jeudi 18 octobre 2012

Montagnes Pyrénéééééées, vous êtes ....

Quand on y pense, c’est bizarre et déconcertant une montagne.
D’abord, ça ne sert rigoureusement à rien, sinon au plaisir quelque peu vicelard des tordus qui aiment à la dévaler planches au pieds l’hiver (dont je fais partie) et à l’escalader en suant l’été.
A part ça, c’est d’un chiant! Surtout quand –et c’est souvent le cas- elles se mettent à plusieurs pour emmerder le monde.
Voyez les Pyrénées par exemple! Enfin, moi je les vois à l’instant où je vous écris…
C’est qu’elles nous empêchent de reluquer peinard l’Espagne ces connes!

Pour aller d’Orthez à Pamplona, c’est à peine 130 kms à vol de mouette rieuse ou de gypaète barbu, soit une heure d’autopista virtuelle, mais en fait, sans le secours des volatiles, faut se cogner 3 heures par Roncevaux et le Basquistan (ou 2h30 et 200 kms par Béhobie).
Donc, la cause est entendue, la montagne, c’est con, chiant et inutile.
Néanmoins, on ne sait pas trop pourquoi, ça existe!

Mais ça n’existe pas de la même façon d’où qu’on la regarde.
Un aragonais ou un navarrais vous soutiendront mordicus que leurs putains de montagnes sont arides et fauves, quand un ossalois ou un aspois les tiendront pour des trucs plutôt humides et verdoyants.
Ils ont tous raisons, et pourtant ce sont les mêmes montagnes qui, au plus fort de l’hiver sont enneigées à l’ubac et rocailleuses à l’adret.
Tout est une question –à tous les sens du terme- de point de vue.

Je me suis longtemps figuré Dieu -mais pour ceux que cela gêne, on pourrait tout autant le remplacer par «Vérité Ultime», «Principe Suprême», «Amour infini», «Harmonie complète», «Grand Horloger», «Architecte de l’Univers», «Bing Bangueur Fou», «Chaos sublime», «Néant Total» ou «fumeur de Farias»- comme une montagne.
Une montagne assaillie par la multitude des humains qui empruntent qui la face sud, qui la paroi nord, qui la déclivité ouest, etc.
Ainsi, il existerait un versant mahométan, un versant chrétien, un versant juif, etc. qui appartiendraient à la même montagne mais vue sous des angles différents.
Il y a même des agnostiques qui ne savent pas exactement si la montagne existe ou non, des athées qui prétendent qu’elles n’existe pas et que c’est une création des hommes, mais également des chamanistes, des animistes, des panthéistes, et toutes sortes de petits sentiers, certains même ouvrant des pistes nouvelles.
Ceux du sud sont prêts à guerroyer contre les nordistes, aux motifs que leur montagne est blanche quand les autres iraient au martyre pour plaider sa verdeur.
Mais là aussi, c’est toujours de la même montagne qu’il est question.

En fait, la montagne seule  sait ce qu’elle est, la montagne seule peut embrasser la plénitude de son être et de ses apparences, comme un humain perçoit aussi bien la globalité de son corps, de sa silhouette que les détails de son orteil ou du lobe de son oreille, ce qu’une puce ne pourrait jamais envisager depuis son millimètre carré d’épiderme.
La montagne pyrénéenne par excellence, c’est le Vignemale, double fois montagne puisque l’étymologie de son nom provient de deux racines pré-indo-européennes vin et mal signifiant toutes les deux … «montagne».
Vignemale face nord
Partagée entre le Parc National français et la réserve espagnole d’Ordesa, on serait bien en peine de dire si la réalité de ce géant est mieux appréhendée depuis Bielsa ou depuis Luz Saint Sauveur.

Vignemale depuis le sud
Il y a 500 ans, si l’on avait montré à des autochtones des deux versants, des clichés du coté opposé, chacun aurait nié farouchement qu’il s’agisse de la même montagne. Et pourtant!
Il y a d’autres manières d’interpréter la montagne.
Les poètes la chanteront, les aéronautes la survoleront, les naturalistes la peupleront de faune et de flore, les topographes la planifieront et les géologues la dissèqueront, la découperont en tranches, l’expliqueront, restitueront son histoire, y compris sans jamais y avoir mis les pieds, attestant d’une réalité irréfutable que les berger installé sur ses pentes peuvent méconnaître complètement.

Il n’existe donc pas UNE VERITE ABSOLUE que tel ou tel pourrait revendiquer, il y a DES VERITES RELATIVES et FRAGMENTAIRES, ou plus exactement plusieurs facettes parfois contradictoires d’une même et unique réalité vue sous des angles, des prismes, des méthodes, des présupposés, des histoires, des subjectivités, des sensibilités, des cultures, etc. différents.
Tout simplement parce qu’un esprit humain limité et subjectif ne saurait tout englober, y compris l’intériorité de l’objet.
Cela semble évident vu comme cela, n’est-ce pas?
Quasiment simpliste?
Indigne d’être énoncé?
De l’enfonçage vain de portes ouvertes?

Cela ne l’est nullement.
A la suite de mon divertissement nîchmois sur l’événement cosmique tomasien, l’irrévérence du propos m’a valu une bordée de commentaires injurieux d’une violence qu’en matière de tauromachie, on ne rencontre généralement que de la part des «zantis».
Pourtant la «montagne tomasiste», je l'ai vu moi aussi, non pas in situ, non pas à l'instant, mais par le filtre déformant (ou au contraire révélateur) d'un petit film d'amateur.
Et tel que je le décris, c'est une partie fragmentaire d'une certaine réalité, vu sous un certain angle, à partir de certains critères qui EN VALENT BIEN D'AUTRES.

Ce genre de truc m’amuse et me questionne: en général lorsqu’un quidam est en rogne, une petite voix me susurre toujours que c’est avant tout contre lui-même. Parce que s’il est une espèce que les gens ne supportent pas, c’est bien celle des «salisseurs de rêves», des «destructeurs d’utopie», des «anéantisseurs de jouissance».
Allez révéler à un gugusse que la nuit de volupté absolue qu’il a connu s’est déroulée avec un transexuel brésilien mais qu’il était trop bourré pour s’en apercevoir, vous m’en direz des nouvelles…

De la sorte la dissection ludique d’une faena «anthologique» qu’on a encensé à l’excès, à partir de la vidéo médiocre d’un témoin mal situé, a déclenché des fureurs hors de proportion avec le propos.
Personnellement, à leur place j’aurais réagi sur le mode: «Ah bon! Ouais! Bof!» ou « Si ça lui fait plaisir!», voire «C’est une façon de voir les choses!».
Mais, je sais être plus con que les montagnes, Dieu ou la Vérité qui, pour leur part ne disent rien de rien, puisqu’ils n’en ont rien à foutre de ce que l’on pense d’eux.
Ce qu’il conviendrait d’ailleurs d’expliquer à ceux qui s’émeuvent des caricatures ou des blasphèmes.
Car les mêmes qui s'offusqueraient à juste raison qu'on muselât la presse, qu'on censurât un caricaturiste ou un polémiste, parce qu'il aurait raillé Mahomet, le Pape ou la Vierge Marie, poussent des cris d'orfraie lorsqu'on déboulonne Jose Tomas...
Allez y comprendre quelque chose...
Heureusement que je vis en la doulce France. Plus à l’Orient, on m’aurait sans doute «taurinement fatwatisé»!
Xavier KLEIN