Humeurs taurines et éclectiques

vendredi 12 février 2010

DEBAT AVEC JEAN PAUL RICHIER

AVERTISSEMENT

J’ai délibérément «retenu» des interventions de Jean-Paul RICHIER, notre «zanti» préféré, qui, avec humour, finesse et culture, et souvent... provocation, accepte le débat en argumentant.
Ces interventions qui entraient peu à peu dans la profondeur du sujet m’ont paru nécessiter un article à part entière plutôt que des commentaires.
C’est pourquoi, je les publie aujourd’hui, veuillez m’excuser pour le retard.
Etant donné le développement de certaines des contributions qui engendrent de longs commentaires très argumentés incompatibles avec le format limité possible, je propose, tant à J.P. RICHIER qu’aux contradicteurs de me transmettre des articles structurés (2 pages TIMES format 12 maxi: après le lecteur ne lit plus…) que je publierai tels quels à une rubrique «Débat ZANTIS» sans connotation péjorative).
Il va de soi que je ne publierai que les articles ARGUMENTES, susceptibles d’engager une réflexion et un débat, même vif, tels que ceux de J.P.R. et non des ramassis de poncifs.
Il va de soi aussi que cette rubrique ne passionnera peut-être pas tous les lecteurs, et qu’auquel cas, il leur sera loisible de passer outre. En ce qui me concerne elle me paraît incontournable.
Référence :
http ://bregaorthez.blogspot.com/2010/01/muy-inkorrekt.html
Xavier KLEIN


XK : «Le problème, c'est la représentation culturelle du rapport de l'homme à l'animal qui diffère.»

J.P.R.: Depuis le temps que je me tue à vous le dire.

XK : « Le problème, c'est le rapport et la représentation divergente quant à la souffrance et à la mort. »

J.P.R.: Vivi, la souffrance et la mort des autres : des bovidés (je sais, ça ne compte pas, ils ne partagent que 80% du génome de l'Homo sapiens® et n'ont même pas d'âme), éventuellement des types en bas roses. Air connu.
Je veux bien que le passionné de corrida s'identifie au toréador, mais aussi au taureau. Surtout s'il a la fibre torista. Mais l'une des rares choses pertinentes qu'écrit M Wolff dans son inénarrable filosofie de la corrida, c'est que l'opposant à la corrida s'identifie au taureau souffrant, et le passionné de corrida s'identifie au taureau combattant.
En tout cas, quelle que soit la complexité des jeux identificatoires, la souffrance reste extérieure. On est dans le spectacle de la souffrance et de la mort.
Au moins les types en bas roses, pour lesquels je n'ai pourtant pas l'ombre d'une sympathie, mettent-ils parfois en jeu leur souffrance propre. La pulsion sadique d'un José Tomás est indubitablement une pulsion sado-masochiste.
«ASSUMONS, NE CHERCHONS PAS A NOUS JUSTIFIER.
Le Toro saigne : OUI
Le Toro a mal : OUI
La mise à mort et la façon de la donner est le but suprême de la Corrida : OUI
Et alors, il est la pour ça, non !!!!! »
Voici votre thèse récemment exprimée en quelques phrases par Monsieur
Colmont. Il a dû lire votre blog en cachette et, en bon hystérique, se dire qu'il fallait faire comme les intellos: assumer sans déni. Mais sans votre talent d'écriture, ça passe un peu moins bien...
Commentaire a posteriori de X.K.: Voilà que nous avançons. Nous sommes d'accord sur un certain nombre de conclusions:
1°) «Le problème, c'est la représentation culturelle du rapport de l'homme à l'animal qui diffère.»
2°) «Le problème, c'est le rapport et la représentation divergente quant à la souffrance et à la mort.»

Désaccord: «l'opposant à la corrida s'identifie au taureau souffrant, et le passionné de corrida s'identifie au taureau combattant.». Je postule, sans le développer pour l'instant, que l'opposant à la corrida s'identifie au taureau souffrant, et le passionné de corrida s'identifie au taureau combattant ET AU TORO SOUFFRANT, DANS UN PROCESSUS DE DEPLACEMENT.»

XK : « Je postulerai donc que le cher J.P. est en fait un aficionado qui veut s'ignorer. Peut-être un repenti. Fasciné par la chose mais encombré par son surmoi pour caricaturer.
Comment expliquer autrement le temps, l'investissement et la connaissance tout à fait extraordinaires pour un «zanti», consacrés à un débat somme toute très périphérique? »

JPR: Je signale d'abord qu'il convient de ne pas confondre le plan des déterminismes, qu'ils soient psychiques, biologiques, familiaux ou sociaux, avec le plan du discours du sujet comme membre du corps social, et des valeurs qu'il «choisit» d'y défendre. On peut se livrer à une psychanalyse plus ou moins sauvage des uns et des autres, avec plus ou moins de bonheur, mais ceci ne valide ni n'invalide leurs positions morales, politiques ou sociétales.
Ceci recoupe ce que je pointais dans un autre fil en écrivant (pardon de me citer) : «je vous invite à ne pas confondre l'approche descriptive avec l'approche prescriptive, la logique explicative avec la logique normative. »
Par ailleurs, la question de la corrida est certes extrêmement périphérique sur le plan quantitatif (i.e. les hommes et les animaux concernés). Mais elle est symbolique d'une question de toute première importance, en ce qu'elle la met en scène pour ainsi dire à l'état pur: la pulsion sadique, (NOTA X.K.: ET LA PULSION MASOCHISTE) aussi bien dans l'acception de la première théorie des pulsions que dans celle de la seconde.
Et j'ai par ailleurs pour habitude de bien connaître ce à quoi je m'attaque, quel que soit le domaine.
Ceci étant posé, il vous est tout à fait loisible de tenter une psychanalyse des défenseurs des animaux, voire de ma personne en particulier.(pourquoi diable Annie Maïllis et Francis Wolff, qui vont enfin éclairer le monde, ne vous ont-ils pas invité
le 30 janvier à Arles ?)
Dans la mesure où les pulsions agressives habitent tout le monde, et moi le premier, il faut bien en faire quelque chose.
On peut tout à fait poser l'hypothèse que des défenseurs des animaux sont mus par ce que les psychanalystes appellent, dans le cadre du fonctionnement névrotique, des formations réactionnelles, c'est-à-dire des attitudes psychologiques de sens opposé à un désir refoulé, et constitué en réaction contre celui-ci. Dans cette hypothèse, le combat contre la corrida serait le contre-investissement conscient opposé à un investissement sadique inconscient, une réaction contre la force des pulsions agressives.
Pour ma part, s'il existe au tréfond de mon âme des pulsions agressives orientées contre des animaux (NOTA X.K.: Pourquoi limiter aux animaux, et pourquoi ne pas postuler que les animaux ne sont là que des substituts ou des objets de transfert?) , je n'en ai jamais identifié d'indices. Si tel était le cas, je le reconnaîtrais bien volontiers, comme puisque ça ne changerait strictement rien au fond du problème. Lutter contre la violence des hommes envers les hommes ne m'empêche ainsi nullement d'identifier en moi l'existence de consistantes pulsions agressives orientées contre mes semblables. Cette identification est d'ailleurs le meilleur moyen d'éviter de les mettre en oeuvre si un jour l'occasion m'en était donnée.
Je n'ai certes pas, par définition, accès à tous les recoins de mon inconscient, mais faire systématiquement de l'empathie militante pour d'autres formes de vie une formation réactionnelle attestant de pulsions zoosadiques serait, vous en conviendrez, assez court.
La question de fond est plutôt de tenter de comprendre pourquoi certains êtres humains se construisent en coupure et en opposition aux autres formes de vie animale, y compris les plus semblables, et pourquoi d'autres se construisent en continuité et en empathie avec ces autres formes de vie, au moins les plus semblables.
Le problème est d'autant plus complexe que l'identification et/ou les liens affectifs s'empêchent pas les conduites destructrices et sadiques, les anthropologues en ont maintes illustrations. J'ai moi-même rencontré cet été un amène éleveur tarnais, amoureux et connaisseur des bovidés et en particulier de ses vaches Salers, mais paradoxalement amateur de corrida.
Si l'environnement culturel (de l'économique au symbolique) tient évidemment un rôle clé, des facteurs individuels restent à élucider.
On peut également tout à fait, pour revenir à votre logique, poser l'hypothèse qu'entre en jeu ce que les psychanalystes appellent la sublimation, c'est-à-dire l'orientation des pulsions, en l'occurrence agressives, vers des objectifs sociaux ou culturels. Le combat contre la corrida peut être par exemple une manière d'orienter son agressivité qui ne fait souffrir personne, ni animal ni homme, il ne fait que contrarier le mundillo. (NOTA X.K.: Il est évident que se faire traiter de bourreau, de tortionnaire, etc. par nombre de zantis ne serait nullement de nature à faire souffrir, moralement j'en conviens (mais certains vont plus loin et s'attaquent aux biens et aux personnes) les récipiendaires de ces amabilités)
Je ne songerais ainsi nullement à nier qu'outre la pulsion épistémique, c'est la pulsion agressive qui me fournit l'énergie de ces échanges ici. Il est même trivial de le reconnaître. Je ne conteste donc aucunement vos métaphores agonistiques, qu'elles soient guerrières ou tauromachiques.
Mais Monsieur Sigmund a le premier insisté sur le type de mécanismes que je viens d'évoquer dans la genèse du Surmoi et dans l'élaboration des qualités qui font de l'homme un être social et sociable. Souffrez donc que, loin de les dénier, je les revendique. Et que l'une de mes façons de gérer ma part de Unbehagen in der Kultur (NOTA X.K.: "Malaise dans la Culture", ouvrage majeur de Sigmund Freud) soit de combattre l'une des vôtres.
Ceci dit, vous avez négligé une piste (NOTA X.K.: Laquelle cher J.P., nous avons hâte?) ..Vous allez chercher midi à quatorze heures (c'est le propre de la psychanalyse), mais en contournant une évidence. A moins que vous n'ayez pas bien lu le texte de ma motion.

Pour conclure, il me semble que J.P. RICHIER se livrant ici à une très honnête analyse de CE QUI AGIT AUSSI les anti-corridas entre vraiment dans un débat intéressant. A SUIVRE
.

2 commentaires:

el chulo a dit…

on en parlera.

l'université de nimes?????????????a octroyé le satatut de "sportif de haut niveau" à un apprenti torero.

merde on s'éloigne du modèle artistique unescoien!

quand je vous disais que le modèle économique et "philosophique"de ces messieurs les pince monnaie était le foot.

choquant, dégoûtant, absurde, imbécile, obscène, ridicule,insultant!

à vomir!

Jean-Paul Richier a dit…

JPR : « Ceci dit, vous avez négligé une piste (NOTA X.K.: Laquelle cher J.P., nous avons hâte?) . Vous allez chercher midi à quatorze heures (c'est le propre de la psychanalyse), mais en contournant une évidence. A moins que vous n'ayez pas bien lu le texte de ma motion. »

Laquelle ?
Vous avez le 15 février publié un article (méritant, de la part d'un taurin) sur les enfants toreros. Encore un effort, et interrogez-vous sur les diverses façons dont peuvent réagir les enfants qu'on emmène à des spectacles de corrida.