Humeurs taurines et éclectiques

vendredi 5 avril 2013

Le 8 mai 2013, Saint-Sever sera t-il le centre du monde taurin?


MISE AU POINT PREALABLE
pour répondre aux malfaisants ou aux mal informés

A l’automne, je reçus un appel téléphonique de Juan SANCHEZ FABRES m’informant de la possibilité de disposer d’un lot de ses Coquillas pour la temporada à venir. Cette opportunité résultait des conséquences des novilladas madrilènes de fin de saison (consacrées aux «encastes rares») où certains des novillos qu’il avait proposé avaient été refusés par les instances de Las Ventas pour … excès de trapio.
Quelle ironie pour cette ganaderia dont les pensionnaires ont été boudés pendant des années par cette même plaza pour … défaut de trapio!
Il demeurait donc une dizaine de novillos à Pedro Llen, la finca historique de l’encaste Coquilla soit l’occasion unique de donner la première corrida depuis 1993, si je ne m'abuse.

Cela fait des années que la Commission Taurine d’Orthez avait pris contact avec la «Casa» SANCHEZ FABRES pour organiser un tel événement. Nous avions même étudié de réserver un lot 2 ans à l’avance. Las! Les vicissitudes des sanamientos, les aléas du sésame de la carte verte avaient rendu la chose impossible jusqu’à présent.
C’est donc avec empressement et espoir que des membres de la commission se rendirent chez Juan dans leur tournée de sélection, ce lot de SANCHEZ FABRES jouissant de l’a priori le plus favorable.

Veni, vidi et Léonard de Vinci comme on dit dans les travaux publics!
Rien ne nous aurait plus comblé que de conjuguer l’amitié, l’afición et la fierté de présenter pour la première fois depuis longtemps –et sans doute la dernière- les légendaires Coquillas de SANCHEZ FABRES.
Malheureusement, ce lot ne présentait aucunement les garanties qu’Orthez se doit d’assurer au public. Un public divers mêlant néophytes et «flor y nata» de l’afición. C'est à dire un mélange de gens à même de comprendre la portée de l'évènement et ses contraintes et d'autres qui ne le pourraient pas et glapiraient à la première encornure mal foutue.
Il faut également dire que l’enthousiasme aidant, par le passé, nous avons eu de graves déconvenues avec des ganaderias dont la camada est très réduite. On se rappellera notamment de la corrida de Montesinos où, partant de 11 exemplaires à l’automne, nous nous étions retrouvés une semaine avant la journée taurine avec 5 toros disponibles. Partant des meilleures intentions du monde, pour ne pas dénaturer le lot, nous nous étions résolus, en désespoir de cause, à inclure un semental que sa fonction intensive avait quelque peu «rabougri».
Que n’avions nous pas entendu!
Ce sont des expériences dont on se souvient et dont il faut faire son profit. Commettre une erreur une fois, passe! on vous la pardonnera. La répéter c’est une faute, pire, une «tonteria».
Sur la dizaine de toros proposés par Juan, seule la moitié répondait aux exigences d’éthique taurine (présentation, conformité au morphotype de l’encaste, etc.) que nous nous sommes imposés. Qu’un accident de campo, une pelea, une atteinte, surviennent –ce qui est commun chez les Santacolomas- et nous prenions le risque de présenter un lot incomplet ou imparfait à nos yeux.

De facto, Orthez est considérée -ce que nous assumons- comme une arène «militante» porteuse d’un haut niveau d’exigence en ce qui concerne l’objectif qu’elle s’est fixée: la célébration d'un toro complet, intègre, dans le type, d’une présentation impeccable. Or, c’est la responsabilité directe et incontournable d’une organisation que de répondre à cette exigence là.
On choisit l’élevage en fonction de ce que l’on peut raisonnablement envisager et préjuger, on connaît ses caractéristiques et ses références, on sait par exemple que généralement ses ouailles sont encastées, ne chutent pas ou qu’ils sont mobiles. Par contre, on ne maîtrise en rien ce qui se passe le jour J, à l’heure H. On ne sait jamais comment se comporteront les toros. Cela ne dépend pas de nous. Cela relève des toros, des toreros, de la météo, du public, de la chance...
Tout ce à quoi est tenue une organisation sérieuse, là où elle engage sa responsabilité et sa compétence, c’est de sélectionner des ganaderias et dans celles-ci des toros irréprochables. On pourrait légitimement l'incriminer qu’ils ne le soient pas.
Après, Dieu et les toros disposent, et si les choses n’aboutissent pas au résultat espéré, l’organisateur sérieux peut conserver sa sérénité en âme et conscience: il a fait son job.
C’est la raison pour laquelle, après débats et avis unanime, la commission a considéré, la mort dans l’âme, que faute d’assurances suffisantes, elle ne pouvait prendre le risque de retenir le lot de SANCHEZ FABRES.
Une décision parfaitement assumée par votre serviteur, Président de la commission.

Dans la vie, il me semble qu’il s’agit d’être cohérent et de se refuser à prêter le flanc à la critique. L’amitié et les affects personnels (et ils existent à l’endroit de Juan) doivent céder le pas à l’objectivité et à la cohérence en matière d’organisation et de choix, sinon on donne dans le copinage et les compromissions, options qu’en ce qui me concerne, je réprouve impitoyablement.
D’une certaine manière, Orthez constitue le porte-étendard d’une éthique taurine exigeante. Elle ne peut y déroger et compromettre sa réputation, cet idéal qu’elle porte, et par delà, à cet idéal porté par d’autres plazas amies et par toute une frange de l’afición qui conserve ainsi des raisons de croire et d’espérer.
Ce fut un choix difficile, douloureux et mûrement réfléchi. Ce ne fut la «faute à personne», sûrement pas celle de Juan SANCHEZ FABRES, ganadero de passion et de cœur. C’est la faute des temps, du système, des modes, des contingences commerciales modernes, qui ont peu à peu marginalisé une ganaderia des plus intéressantes, la contraignant drastiquement à réduire sa camada pour survivre tant bien que mal.

LE COLLECTIF PEDROLLEN
Pour autant, ce lot doit être vu, ce lot doit être combattu. Il serait scandaleux qu’il terminât honteusement dans un matadero.
Ce qu’Orthez ne peut réaliser, arc-boutée sur les maigres possibilités d’une seule corrida annuelle, sur ce pistolet à un coup qui doit absolument porter, il fallait que d’autres l’entreprennent pour que cela soit.
C’est ce qu’ont entrepris les passionnés du collectif Pedrollen (http://collectifpedrollen.blogspot.fr/) piloté, il faut le souligner, par deux jeunes gens animés par la passion et la fougue.
Une entreprise noble, légitime et cohérente.

Cette corrida est indispensable car cette corrida est un acte d’afición pure, qui concerne les purs aficionados. Non pas, comme ailleurs, des «spectateurs», mais des aficionados de verdad susceptibles d’en goûter jusqu’à la dernière molécule, d’en apprécier la rareté, de se satisfaire du désir non assouvi, de l’imperfection possible, des défauts probables.

Sans nul doute, ce lot ne sera pas, PHYSIQUEMENT, le lot le mieux présenté de la temporada, mais ce sera indubitablement LA corrida de la temporada dans le Sud-Ouest.
Parce que ce jour là seront convoqués la nostalgie, la saveur exotique et surannée des toros d’antan, de ces légendaires Coquillas «dulces como rosquillas y picantes con guindillas», le chant du cygne d'une certaine conception poétique et honorable du toreo.
Comment ne pas évoquer les «faiseurs de gestes à bon compte», les señoritos de l'ex-G10 dont un représentant s'honorerait de venir gratuitement par pure afición pour des purs aficionados mettre en pratique les hauts sentiments ressassés et non suivis d'actes concrets?

Antoine CAPDEVILLE et Luc LARREGAIN, ces jeunes aficionados qui se remuent, portent un message d’espoir et un volontarisme qui viennent rompre avec la plainte habituelle, les larmes de crocodiles de ceux qui déplorent le glorieux passé, mais ne se mobilisent pas pour autant dans le présent.
Combien sont à la manœuvre?
Combien seront présents pour soutenir, le jour dit?
Ils ont besoin d’aide, de notre contribution, de notre engagement.
Nous le leur devons, pour que ces nouvelles générations continuent à croire que tout reste possible, et pour que nous même continuions à rêver, à espérer, à agir, sans céder aux discours de résignation ou de défaite.
Le 8 mai 2013 devra être un jour de Victoire, sur le fatalisme, le repliement, les présupposés capitulards. Sur ceux qui déplorent tout en étant absents et inactifs.
Et s’il le faut, il faudra se rendre à Saint-Sever, dans les arènes Henri CAPDEVILLE (qui s'en retournera d'aise dans son sépulcre le cher vieux bougre…) à genoux, comme en pèlerinage.
Plus que quelques jours pour s'engager.
Plus que quelques jours pour contribuer.
Xavier KLEIN

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11 commentaires:

Pierre THOMAZO a dit…

Ole ! On y sera !

el du moun a dit…

Tout est dit,
la nécessité de lidier ces toros, les contingences restrictives dues au type de corridas proposées, ici et là, mais surtout le romantisme un peu fou de ces jeunes gens, qui pose des roses sur leur chemin.
Que certains “pros“, s'y piquent aux épines, que d'autres aficionados y'a qu'a faut qu'on ne mettent pas la jambe...Antoine ne le sait pas encore, il écrit une des pages les plus belles de la tauromachie..et encore bravo pour votre honêteté....Orthez aurait aussi pu être l'écrin de ces derniers coquillas, mais tout le monde n'aurait pas compris....
Avec toute ma considération
Christian Frizzi

el du moun a dit…

Tout est dit,
bravo pour votre honnêteté sur les raisons claires du choix des arènes, bravo aussi pour vos commentaires concernant les y'a ka fo kon qui ne mettent jamais la jambe, et aussi pour l'aide apportée à ces jeunes dont le romantisme de l'action menée, fait qu'à ce jour, ils ne se rendent pas compte de la notion “historique“ de leur geste
cordialement
Christian Frizzi
CHF

Ludovic Pautier a dit…

mais bien sûr qu'on y sera. Antonio est mon nieto et luc mon ami mais qu' à cela ne tienne : el que tiene aficion, la de veras, no puede faltar. on s'organise un tiap ou ils ont prévu de quoi casser le graine ?

Bernard a dit…

Mon cher Xavier,

Merci pour la "transparence" de ta relation, qui - à nouveau - honore Orthez.

Cette belle jeunesse mérite que son rêve se réalise, et le nôtre avec !

On en sera, même si une impardonnable étourderie a bien failli nous faire manquer l'échéance du 7...

A se revoir donc le 8 mai au "centre du monde taurin",

Abrazo fuerte - Bernard "Largo campo"

Anonyme a dit…

payer ses billets est "être à la manoeuvre"! Arrêtez de donner des leçons! Y'a pas de copinage dans votre callejon vous qui le combattez "impitoyablement"?

Anonyme a dit…

Une fois encore, Xavier a su faire la part des choses avec talent. En soulignant au passage pourquoi il n'était pas envisageable de lidier ces toros dans une corrida sérieuse.

CHF est moins mesuré. Ceux qui ont des objections (qu'ils n'ont pas exprimé par retenue et dans le but de ne pas contrarier l'initiative volontaire de ces jeunes aficionados)) sont à ses yeux des "pros" voués à se piquer aux épines, des ya ka fo kon qui ne mettent jamais la jambe etc...

Je pose la question : mettre aujourd'hui dans un concours de beauté BB serait donc un geste de portée historique, et un hommage à la beauté ?

En réalité, certains dont je suis, tout en respectant l'initiative, peuvent penser que le compte n'y est pas, et qu'on risque de mettre en exergue la déchéance d'un fer qu'on a pas su pérenniser, quelles qu'en soient les raisons. L'apologie d'un échec en quelque sorte.

Xavier KLEIN a dit…

Où ai-je parlé de callejons dans cet article?
Le courage de certains anonymes me sidère. On se croirait parfois revenu au bon vieux temps de «Je suis partout» ou de «Gringoire», quand on signait «un bon français».
D’autant qu’à la médisance on ajoute l’ignorance: j’ai écrit sur ce sujet ( http://bregaorthez.blogspot.fr/search/label/callejon)

Quant au dernier commentaire, je répondrai que la notion de «déchéance d’un fer» induit qu’on se réfère à une norme, un modèle idéal de caste par rapport auquel les Sanchez Fabres seraient «déchéants», ce qui suppose des préalables que je conteste.
On peut légitimement nourrir des objections –mais qu’est-ce qui échappe aux objections?-
On peut notamment penser (et exprimer) que le comportement de ce type de toros est daté et ne correspond plus aux canons du toreo moderne, c’est sans aucun doute vrai!
Mais si cette assertion est vraie, il me paraît justement qu’il est important et intéressant de les voir. Non seulement pour enrichir sa culture de comportements «autres», mais surtout pour affirmer une nécessaire diversité.
Si par contre, on soutient que la ganaderia pâtit d’une perte de caste –ce qui paraît inscrit en filigrane dans le commentaire- cela me semble relever d’un procès d’intention.

«Moët Hennessy» comme on dit Outre-Manche, et jugeons sur pièces!!!
Et la présomption d’innocence?

Bernard a dit…

Aux anonymes, qui mettent la jambe "moralement" (comme pour les palmes académiques de Topaze chez ce cher Pagnol!),

Et l'Honneur, foutre Dieu, ça compte pas? Ces toros ne seraient plus ce qu'ils furent - ou pire ce qu'ils eussent pu être si?... (c'est peut-être un peu pour ça, comme l'a expliqué Xavier, qu'ils n'iront pas à Orthez)
Mais nous-mêmes, sommes-nous toujours à la hauteur de nos rêves!?...
Eh bien, ce 8 mai, nous irons pour le moins rendre un hommage à nos rêves enfuis ou enfouis, et remercier ces "petits" qui font montre d'une si belle aficion (dont ils s'emmagasinent sans le savoir les belles émotions pour plus tard)!

Suerte para todos - Bernard "Largo campo"

PS : A Ludo, pour "l'intendance", le cas échéant faudra se rencarder...

Clément a dit…

#semental que sa fonction intensive avait quelque peu «rabougri»#

pouvez vous m'en dire plus? car ( je n'y étais pas et) un semental de moins de 6ans en fonction intensive ça m'intrigue

Xavier KLEIN a dit…

La ganaderia d ‘Adolfo MONTESINOS est récente et toute petite. Ce vétérinaire spécialiste des Santacoloma, journaliste audiovisuel est une figure éminente de l’aficion qui a «avancé la jambe» en créant son propre élevage.
Malheureusement, sa production était terriblement restreinte (une dizaine de toros/an). Lorsque nous l’avions retenu en 2009, nous avions choisi en novembre sur une camada de 11 toros. Au fil des mois et des peleas (les santacolomas se battent beaucoup), l’effectif se réduisait. Quelques jours avant la corrida, il n’en restait plus que 5. Pour ne pas dénaturer le lot, Adolfo avait proposé un toro de 4 ans et 5 herbes qui exerçait ses fonctions comme semental depuis le printemps, ce qui advient souvent dans les petites ganaderias qui ne disposent pas des latitudes des grandes. Ce semental pur Buendia concrétisait l’orientation qu’Adolfo voulait donner à son élevage.
Un printemps à couvrir ces dames avait considérablement efflanqué le bonhomme.
C’est du moins ce que nous avait déclaré Adolfo, aficionado intègre et éleveur sérieux dont nous n’avions aucune raison de douter de la parole et qui avait tout intérêt à présenter ses toros sous leur meilleur jour.
Sortir ce semental était une erreur…