Humeurs taurines et éclectiques

lundi 1 février 2010

VERS UN MUNICH TAURIN II

" Toréador mort" d'Edgar DEGAS (NON Edouard MANET: merci LUDO!!!)

L'ami Bernard (GRANDCHAMP) me fait parvenir ce texte, qu'il n'a pu insérer dans les commentaires du fait de sa longueur. A noter, que de même, des textes sont en attente de parution (dont un long et pénétrant commentaire de J.P. RICHIER) parce que leur taille ou leur intérêt mérite un article:

1 - « … quel sera le spectacle taurin du XXIe siècle? »
Spectacle taurin: le mot même de corrida, en son plein sens de combat, de sang, de mort, a disparu (''cachez ce sang que je ne saurais voir''?). Et cela, d'emblée, n'est pas anodin.
4 - « … ce toro qui n'existe pas de manière naturelle »
Le toro de combat a-t-il jamais existé de ''manière naturelle''?... Si on date de façon conventionnelle au début du XVIIIe siècle la mise en place de l'élevage des toros de combat, considérant que –comme dans toute forme d'élevage– il s'agit d'orienter les effets du hasard dont est constituée la nature naturelle, c'est à dire LA NATURE SANS NOUS, le toro de combat n'a jamais été –à toutes ses époques– que celui qui était le plus acceptable par nous, statistiquement, conventionnellement, artificiellement au sens où le peintre Degas disait: «L'Art est une convention, le mot Art implique la notion d'artifice». Or, dans cet artifice, il y a tout l'humain, tout ce qui fait l'humain d'Homo sapiens sapiens:
comme tous les produits de l'activité humaine, le toro de combat est un produit artificiel,
comme le cheval de course, la machine à laver ou l'ordinateur...
5 - «… l'usage des fundas ...»
De fait, les fundas sont un (nouveau) produit de l'artifice humain. Et si la raison –tout au moins l'une d'entre elles– de cette protection n'était pas réellement que nos ''braves'' (au sens méridional!) toros désormais ne ''se blessent ou se tuent'' plus?... L'idéal ne serait-il pas qu'on sélectionne bientôt (via quelque opportun OGM, pourquoi pas crocodilien?) des toros aux cornes amovibles?... Au campo, ils seraient ainsi élevés sans leurs cornes (finis les risques d'usures malvenues –susceptibles de gêner quelque reconocimiento-, et les risques de ''perte de marchandise'' due aux blessures ou morts intempestives); et on leur (re)mettrait leurs cornes la veille de l'embarquement...
6 - « … pourquoi le public se détourne progressivement des arènes. »
Si, par miracle et au hasard du choix, les arènes de Céret (par exemple) avaient la taille, et le nombre de places de celles d'Arles (ou de Nîmes), seraient-elles pleines?... (pour mémoire, lors de la dernière corrida-concours d'Arles, en septembre, qui vit cependant le triomphe immortel de Clavel blanco, le public devait garnir peut-être un tiers d'arène (soit environ 4 000 personnes). Et, si le public – dont NOUS faisons partie – ne voulait plus dorénavant que des ''parodies de combat''?... Car, du ''vrai combat'' (sang, tripes de chevaux...) il n'en veut plus –nous collectivement n'en voulons plus- (qui voudrait encore voir, par exemple, ce qui était clairement visible sur les écrans pourtant noirs et blancs de nos télé des années 60, des matchs internationaux de rugby où –le remplacement des joueurs même blessés étant interdit– l'on voyait des joueurs... blessés continuer à jouer, où l'éventuel sang sur un visage ou un maillot était un allant de soi?)...
Et si la corrida, en fait celle qu'au fond nous n'avons tant aimée que parce qu'elle était à l'unisson de nos autres croyances –unisson qui fait momentanément une culture ou la culture d'un moment de l'histoire humaine-, si donc ''notre '' corrida n'était tout simplement pas en train de devenir un oxymore – une contradiction dans les termes, en contradiction avec ce que désormais collectivement (statistiquement, culturellement) nous sommes disposés à accepter en matière de ''spectacle'', c'est à dire d'artifice et de convention au sens de Degas?...
7 - « ce n'est pas au spectacle taurin de s'adapter aux exigences d'un règlement inadapté, mais au règlement d'être conçu en fonction des besoins du spectacle que nous souhaitons produire »
Oui, absolument oui, ici tous les mots comptent –même s'ils ne comptent pas dans le sens que nous souhaiterions!-. Mais cela ne veut pas (seulement) dire que ''le marché régulera tout''... Si le public (à tort ou à raison dirait-on, or il ne s'agit là ni de tort ni de raison –mots où l'on verrait une empreinte de rationalité et d'objectivité- mais de la plus pure subjectivité d'un ''c'est mon choix''), si le public donc ne veut plus voir (statistiquement) que des ''parodies de combat'', les organisateurs organiseront ces parodies, car sinon ils n'organiseront plus rien, et –outre avoir perdu tous leurs sous– iront voir ailleurs ce qu'il pourrait bien y avoir à organiser... (pour prendre une image qui m'est chère, le jour où les ''grands vins'' –et même ceux de Bordeaux– seront passés de mode, on n'en produira plus! Or, à nouveau, comme le ''toro de combat'', le ''grand vin'' est une ''convention'' et un ''artifice'' au sens de Degas, quelque chose non pas d'immuable mais au contraire d'éminemment muable, c'est à dire susceptible de muer, de changer...)
8 - « Où sont passés les principaux intéressés, les aficionados? »
Les aficionados? Ceux qui aiment? Certes, mais aiment-ils tous de la même façon? Autrement dit, le jour où ils n'aiment plus de la même façon, où leur aficion –comme en d'autres moments les mouches– ''change d'âne'' (oh pardon, de toro!), où simplement ils n'aiment plus (collectivement) ce qu'ils aimaient auparavant, eh bien ils s'en vont payer ailleurs (un ailleurs où ils peuvent même retrouver des organisateurs partis organiser ailleurs!)
9 - « Le toreo est un art... »
On ne peut mieux répondre qu'en citant à nouveau Degas: « L'Art est une convention, le mot Art implique la notion d'artifice »... Ce que certains parmi les aficionados (certains dont nous sommes) appelent ''combat'' n'est-il pas en fait qu'une ''convention'', en l'occurrence un consensus momentané sur un ''comment'' (sur: quelle forme, d'où quelles règles? Quel ''règlement taurin'', donner à cette rencontre en public entre un homme et un toro? Y faut-il la mort, etc?).
Cela (tout cela) dit, je te rejoins entièrement dans ta conclusion: NUL N'A LE DROIT DE PARLER EN NOTRE NOM! Ce que disent toutes ces citations, c'est juste ce à quoi nous DEVONS désormais nous attendre (statistiquement). Mais ça ne dit nullement que nous devions déjà l'accepter... Et cela veut dire aussi –et plus que jamais désormais- que si nous voulons que le mot ''combat'' conserve l'acception que nous lui connaissons encore –bien que conventionnelle- nous devons être prêts plus que jamais aussi à ''payer pour cette aficion'', au sens très concret de payer nos places de tendidos (et plus si affinités), afin que ceux qui organisent puissent payer les toros (et les toreros, même si n'a pas été évoqué ici le ''qui DEVANT ces toros-ci?'' - et non un ''qui pour ACCOMPAGNER ces toros-là?''), afin que les ganaderos puissent les élever... Parce qu'après le dernier Saltillo, ou le dernier Coquilla, il sera temps d'ouvrir les dernières bouteilles...

Bernard GRANDCHAMP
A lire deux excellents articles sur CyR: «Taisez-vous !» de Laurent LARRIEU et «Idiosyncrasie* du taurino» de Philippe MARCHI
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3 commentaires:

ludo a dit…

xavier,
il me semble que c'est manet, édouard et non degas, edgar l'auteur de cette oeuvre pictural majeure .
abrazo.

ludo

el chulo a dit…

aie ludo, que tio!

Anonyme a dit…

Salut à tous,
C'est effectivement Manet qui est à la manœuvre.
Pour la petite histoire, on présume généralement que ce tableau a été amputé de sa partie supérieure. Il figurait semble t-il dans la partie disparue, un toro, la talenquère et une partie du public. Ça devait jeter !
Alain Lagorce (et non Guy…)