Humeurs taurines et éclectiques

vendredi 19 décembre 2008

CRUZ et CROIX

Un nouvel article de Lionel PIEROBON
Voilà c’est fait, la France vient de célébrer le 09 décembre dernier, le 103ème anniversaire de la «loi concernant la séparation des églises et de l’Etat», dite loi de 1905. Comme pour son centenaire, où les élus de la République ont brillé par leur manque d’enthousiasme à ce sujet, cette année non plus la loi ne semble pas avoir intéressé grand monde, si ce n’est les militants laïques déjà convaincus, et bien entendu, les adversaires de celle-ci, qu’ils soient de droite comme de gauche. Car le combat contre les valeurs laïques n’est pas le fait exclusif d’une droite catholique conservatrice, elles dérangent aussi une certaine gauche que l’on retrouve souvent parmi les adversaires de la tauromachie.
Un jour athée, un jour agnostique, suivant l’humeur, mais radicalement laïque, je réfute les dogmes quels qu’ils soient, religieux, philosophiques, sociétaux. Malgré cela, je constate que l’un des symboles de l’un des dogmes auquel je refuse de croire, se montre jusque dans ma passion des toros.
Ce symbole est la croix, la cruz, celle au centre de laquelle le matador doit plonger son épée pour tuer le toro. Il est attesté que l’homme la connaît depuis l’Antiquité, dans des contrées aussi diverses que la Chine, la Crète, mais aussi l’Egypte, et force est de constater que la croix est présente dans la corrida contemporaine, dans sa dimension géométrique ainsi qu’allégorique. D’autant plus que les représentations allégoriques de notre civilisation occidentale sont le plus souvent tirées de la mythologie greco-romaine, et que la tauromachie puise ses origines dans cette époque lointaine.
Intersection entre deux droites coïncidant avec un centre, le centre du cercle, du carré, mais aussi de la rencontre entre l’homme et le toro au moment ultime de la lidia. La croix peut diviser le cercle en quatre segments engendrant ainsi des carrés et triangles. Comme s’accordent à le dire des spécialistes des symboles, de sa simple observation dérive la perception allégorique la plus complexe.
Complexité qui offre de multiples interprétations qu’il serait trop long et fastidieux d’aborder ici, ne voulant donc pas assoupir le lecteur, je m’en tiendrai à une seule représentation.
La croix est un symbole d’orientation, qui va des quatre points cardinaux aux différents niveaux d’existence de l’homme. La cruz qui m’intéresse dans l’art de Cuchares, est une orientation pour le torero dans sa trajectoire lorsqu’il porte l’estocade puisqu’elle est la cible qu’il vise, mais aussi une orientation symbolique dans son niveau d’existence en qualité de matador.
Pour les anti-taurins, auxquels échappe la dimension justement symbolique de notre passion, et malheureusement, pour une partie de ceux qui se prétendent aficionados en croyant que s’identifier à ce vocable ne consiste qu’à regarder une corrida, le niveau d’existence du torero ne peut être palpable. Pourtant, il est intéressant d’essayer de percevoir les différentes orientations de l’état, de l’existence du matador, que représente symboliquement la cruz visée.
Cela passe par trois phases. Encore le trois que l’on retrouve si souvent en tauromachie. Trois phases symboliques de la croix, qui se retrouvent dans la décomposition en trois temps de la suerte suprême.
Afin de garder l’ordre établit par les spécialistes, l’orientation symbolique que figure la croix dans le niveau de l’existence, débute par l’orientation du sujet animal par rapport à lui-même. Il est dit qu’elle se retrouve au sein du monde terrestre immanent. Il faut l’entendre à mon humble avis, dans sa définition de ce qui est contenu dans un être, en l’occurrence la partie animale dont résulte la nature même du torero. Bien entendu, la seconde définition philosophique qui accepte ce qui relève du caractère de l’expérience, peut être aussi considérée comme part immanente dans le sujet qui nous intéresse. Il semble toutefois plus juste de définir en premier ordre la partie animale du torero, qui le pousse à combattre, puis à tuer. L’animalité du torero vis à vis de lui-même, est figuré lors de l’entrée à matar. Prédateur comme toutes les espèces vivantes mais aussi combattant, il démontre ainsi volontairement tout son côté animal, doucement, à l’affût du moindre mouvement du bicho, il se met en position afin de porter le coup ultime.
Dans l’ordre de l’orientation de l’état de l’existence, la croix représente aussi l’orientation spatiale vis à vis des points cardinaux. Avec cette fonctionnalité de mesure, elle permet dans la tauromachie d’appréhender la distance qui sépare le matador de sa cible. Comme dans certaines représentations ou se joignent le ciel et la terre en la croix, la cruz où est portée l’estocade est le point de jonction entre le temps et l’espace. Le temps mesuré en distance à parcourir par l’homme afin d’atteindre son objectif, l’espace représenté par l’intervalle où la lame s’enfonce.
L’intersection des branches de la croix, marque les carrefours des points cardinaux mais aussi ceux des lieux de cultes, des artères citadines. A l’identique, l’intersection des branches de la cruz représentées mentalement, marque le carrefour des vies. De celle qui s’arrête pour le toro, mais aussi et l’histoire taurine le démontre, de celle qui peut s’arrêter pour le torero lorsqu’il bascule avec la lame sur la pointe des cornes.
Au point central de la croix, s’élève souvent des autels sous diverses formes, lieux de rassemblements et de diffusions des messages. Sur le point central sur la cruz, pas d’élévation d’autel, mais la diffusion du point de départ de l’une des Vérités, à savoir celle de savoir ce qu’il y a après la mort.
Enfin la troisième perception est l’orientation temporelle en rapport aux points cardinaux célestes. L’on peut y voir l’articulation avec l’axe de rotation de la planète, figuré par les pôles nord et sud. A contrario de l’orientation animale de l’existence, qui amène sur le plan immanent, cette troisième perception pose la symbolique de la croix se situant pour les spécialistes sur l’aspect transcendant, plus exactement sur le supra-temporel transcendant. L’on retrouve alors ici toute la dimension religieuse de la croix, celle dont s’est appropriée l’iconographie chrétienne pour signifier le supplice du Christ.
Il est intéressant de noter qu’en tauromachie, la cruz aurait très bien pu être remplacée par un point, un petit cercle et donc nommée différemment. Ce qui aurait très bien été en adéquation avec la représentation qui est communément faite pour désigner une cible. Car il faut garder présent à l’esprit qu’au moment précis de l’estocade, le toro est une cible, comme dans tout combat. Et l’on ne peut nier le fait du combat, puisque suite à la lecture du livre de Francis Wolf, les aficionados se gargarisent à tout va de nos jours pour affirmer comme le philosophe que le toro doit être combattu et non abattu. Affirmation à laquelle je souscris. Pour l’anecdote, «le Popelin» désigne la cruz à l’intérieur d’un cercle. La croix, et donc la cruz, pointe une position comme le font les mathématiciens, géographes, géologues et architectes. Certes le torero est un peu tout cela à la fois. Mathématicien qui calcule les distances dans la lidia, géographe pour la connaissance qu’il est censé posséder des terrains, peut être géologue s'il lui vient l’envie d’étudier la composition du sable du ruedo, mais surtout architecte de son combat. Il est alors certain que l’on peut traduire l’attribution du symbole de la cruz au point de rencontre de l’estocade, par la signification de la position idéale de l’épée. Mais devant les différents facteurs qui rendent l’estocade compliquée et difficile, la symbolisation d’une cible aurait été semble-t-il plus adéquate.
Même si la cible intègre la notion d’une recherche de parfaire le geste, en offrant la possibilité de se rapprocher de son centre, la figuration d’une croix, d’une cruz, paraît être plus parlante au simple mortel. La représentation de la cruz signifie donc plus communément dans l’esprit collectif une recherche de perfection du positionnement de la lame, mais aussi, consciemment ou bien inconsciemment, elle apporte le témoignage symbolique d’une recherche de perfectibilité humaine.


Lionel PIEROBON

4 commentaires:

Anonyme a dit…

J'y vais ,mais j'y crois pas ,car quand on voit le nain cotoyer le pape ,quand on voit ses rapports etroits de la gente avec l'église laissez moi rire.............quand
.... aux agnostiques ce sont des merdes car on croit en dieu ou pas ,moi suis athee et pas besoin d'aspirine agnostique tous les jours.
Quand a la croix chacun la porte tous les jours et on a pas attendu Jesus pour faire 14 stations aux bistrots.
Sur la cruz je prefere l'allee centrale frente al toro que les simulacres des allees latérales

Xavier KLEIN a dit…

Olé Bruno!
Saint Bruno, c'est le fondateur de l'ordre des Chartreux (pas des chartreurs, ni des chartrés!).
les "Cartujanos" en ibérique, les grands initiateurs des élevages braves.
Avec cela, pas étonnant qu'il ait les charges longues et nobles...

Anonyme a dit…

J'aime les gens qui doutent, car ils cherchent, du moins les agnostiques que je connais. Le doute fait fuir les dogmes. Rien ne m'inquiète plus que ceux qui savent à tout prix.
Il n'y a pas que le nain qui couche avec le pape, la gauche possède aussi ses admirateurs de l'opus dei.
Lionel


J'y vais ,mais j'y crois pas ,car quand on voit le nain cotoyer le pape ,quand on voit ses rapports etroits de la gente avec l'église laissez moi rire.............quand
.... aux agnostiques ce sont des merdes car on croit en dieu ou pas ,moi suis athee et pas besoin d'aspirine agnostique tous les jours.
Quand a la croix chacun la porte tous les jours et on a pas attendu Jesus pour faire 14 stations aux bistrots.
Sur la cruz je prefere l'allee centrale frente al toro que les simulacres des allees latérales

Anonyme a dit…

Allons, Bruno, agnostique, athée, ou mécréant, ou même croyant, chacun ses goûts : on trouve de tout, partout. Un peu comme à droite ou à gauche.. Quand à la gôche .....
Mais çà, c'est une longue histoire, à chacun son chemin de croix . Tu en sais quielque chose ?
Hermanidad