Victor Hugo, «Les travailleurs de la mer»
Le 11 novembre à Saint-Sever fait partie de ces rendez-vous de charme que l'on se réjouit toujours d'honorer.
Saint-Sever est un poème et une délectation. L'agrément de ses vieilles pierres qui suintent sous le fin crachin automnal, vous laisse immanquablement un parfum d'éternité, de permanence des choses que vous retrouvez inchangées en dépit du passage du temps.
Dans un monde qui se gargarise de modernité, on y cultive invariablement le suprême raffinement de la conservation opiniâtre du suranné. Un tel havre de paisible immobilisme rassure et émeut dans la frénésie contemporaine.
La braise sommeille pourtant sous la cendre et la vibration indolente de la cité ne demande qu'à s'exacerber. Car pudiquement, derrière la pierre et le ceterach, Saint-Sever cache une âme de feu. Et cette âme ardente, rieuse et fière ne se dévoile nullement mieux qu'à travers la Peña Jeune Aficion.
Ses aficionados ont élevé la convivialité, la loyauté et la constance au rang d'art majeur.
Par amitié pour François (2 exemplaires du genre), Xavier, Vincent, Jeannot et tant d'autres qu'il serait trop long de citer, j'en fus membre fondateur, un privilège et une grâce.
J'aime leur simplicité, leur générosité, leur dynamisme, et cette manière inimitable de vous retrouver comme si l'on s'était quitté la veille, avec la même joie et le même sourire sincère.
J'aime aussi à ferrailler durant des heures dans des débats de comptoir forcenés, ponctués des indignations outragées de François ou des colères pagnolesques de Zaza: on se dispute pour mieux s'apprécier, on se collette pour mieux se rencontrer.
J'aime par dessus tout leur fidélité acharnée à un idéal et à une éthique tant morale que proprement taurine, qui se refuse obstinément à l'engourdissement et aux compromissions de la sénescence. La Peña Jeune Aficion a toujours su jalousement conserver le secret d'une éternelle jeunesse et trace imperturbablement sa route, sans prétentions et avec un inaltérable optimisme.
Les contraintes familiales et professionnelles m'avaient éloignées du pèlerinage obligé, de la cure de jouvence. Le dieu cornu m'y a de nouveau conduit.
Il est des lieux qui gardent la mémoire de ce qu'ils ont vécu, peut être en va t-il de même pour les dates.
Mon enfance fut imprégnée des récits terribles des anciens. De ceux qu'on écoutait d'abord avec effroi à 6 ans, puis poliment à 10, avant que d'envoyer paître les radoteurs à 18.
Il m'a fallu terminer mes études d'histoire, puis parcourir le site de l'ossuaire de Douaumont, pour comprendre que l'interminable plainte de mes aïeux poilus (sic), n'était que le faible et misérable écho des souffrances endurées.
Depuis, pour moi, il faut que sur chaque 11 novembre, se lève une aube blafarde et cafardeuse pour redire inlassablement à ceux qui sont et à ceux qui viennent, la mémoire de l'abominable tuerie et la perte irrémédiable d'un pan de notre ingénuité.
Avec la Grande Guerre, Marianne est devenue salope, comme depuis Auschwitz, on ne peut plus se duper, et à jamais, sur ce que l'Homme peut faire à l'Homme.
Les vieilles coquettes se font tirer la couenne pour tenter de cacher les outrages du temps, il nous faut absolument éviter que notre société ne camoufle tout aussi soigneusement ses cicatrices pour se persuader que le bonheur est possible. Depuis Verdun le bonheur n'existe plus vraiment. Auschwitz lui a donné le coup de grâce.
Pour les lucides, vivre, c'est aussi souffrir. Pour les masochistes c'est surtout souffrir. Pour les imbéciles, c'est ne jamais souffrir...
Faire la fête un 11 novembre revêtirait-il un arrière goût de sacrilège, un peu comme de banqueter le jour des Morts?
Maintenant je suis persuadé du contraire.
François m'avait collé un callejon dans la pochette. C'était tout lui! Il savait que je ne me serai jamais abaissé à lui demander ce genre de chose. Il savait aussi que cela me ferait plaisir. Comme il m'aurait régalé l'âme et le gosier d'un armagnac d'amitié.
Il y a quelques trente ans, la première fois que j'ai assisté à une corrida depuis le callejon, c'était parce qu'il me l'avait procuré, et c’était à Saint Sever.
Le callejon, c'est un plaisir futile que j'aime parfois à fréquenter, comme on s'encanaille dans les rues chaudes. Du callejon on comprend moins bien mais on ressent mieux, ou plutôt différemment.
Ce n'est vraiment pas le lieu d'où l'on dispose de la meilleure vision d'une course. On perd la perspective et la dimension tactique du combat, on ne distingue pas les distances, on ne réalise pas l'éloignement ou la proximité du toro et du torero.
Par contre, on vit en direct la fureur du toro, la sueur et la peur de l'homme. On découvre aussi tous les gestes des coulisses: les mozos qui lavent les épées avec la méticulosité de leur office, l'angoisse ou l'irritation de l'apoderado, l'attention paternelle du banderillero de confiance. On sort du rêve programmé pour entrer de plain-pied dans la contingence, dans un certain désenchantement nécessaire, qui naît des accrocs ou des couleurs fanées des trajes que l'on perçoit si magnifiques depuis les gradins.
L'optique du callejon explique notamment les dérives de beaucoup de nos chroniqueurs qui seraient mieux inspirés d'élever conjointement leurs constats, leurs pensées et leurs culs, pour suivre les opérations sous le même angle que leurs lecteurs, mais aussi que les présidences. L'éclairage étant différent, les points de vue évolueraient peut-être de même, encore que!
Mais c'est peine perdue, et si l'on n'y prend garde, au rythme où courent les choses, on déplacera bientôt les palcos dans la ruelle pour «mieux comprendre», «faciliter la communication», et éviter les regrettables bévues. On n'aura plus à les vilipender dans les reseñas puisqu'on aura eu tout le loisir de le faire in situ, pendant la corrida. Une évolution positive supplémentaire vers le toreo moderne!
Dans le callejon, ce qui est tout à fait répréhensible je le confesse, j'aime par dessus tout à poser le nez au ras des tablas, un peu comme on hume un civet en fin de cuisson, un vieux pauillac qu'on s'est longtemps retenu d'ouvrir, ou le vent du large à la proue d'un voilier (bien que je ne partage guère d'affinités avec Leonardo!).
Tout vous jaillit alors à la gueule, l'odeur sauvage du fauve, le déroulé et le ronflement sourd de ses muscles, le fracas métallique de son souffle sur le capote empesé, le chuintement de l'étoffe, le halètement de l'homme, le sable qui vole, l'éclat et la matière des regards, le sang qui gicle, la sueur qui perle, la puissance charnelle de l'animal, les déplacements choisis et félins du torero, le défi et la moue de ses lèvres. Tout prend corps avec une évidence et une inégalable acuité derrière la mince frontière de chêne.
Il faut oeuvrer pour que tout aficionado connaisse un jour ces sensations si complexes et si intenses. Las! La justification du callejon n'est nullement fonctionnelle, mais avant tout sociale: il importe de se distinguer, d'appartenir à la caste, à l'élite, de jouir d'un privilège dont les autres sont dépourvus.
Merci François pour ce sésame, car pour toi, comme pour moi, ces détails là ne constituent pas un brevet d'honorabilité, mais le passeport exceptionnel pour entrer dans la substance des choses.
Et j'y suis entré!
Les copains avaient bien préparé les opérations, comme il convient à des aristocrates de l'aficion de verdad. Un lot de quatre chipendales, signé La Constancia, bien sous tous rapports, et plus si affinités! Deux toreros andalous, fleuris des ultimes géraniums sévillans (Mario DIEGUEZ, A.Jesus ESPALIU), un jeune apache salmantin, avatar probable de Santiago Martin (Juan del ALAMO), et le régional obligé de l'étape (Matthieu GUILLON).
N'ayant ni la mémoire, ni le désir d'une reseña, mieux vaut traduire l'instant, tel que je l'ai ressenti.
Saint-Sever est un poème et une délectation. L'agrément de ses vieilles pierres qui suintent sous le fin crachin automnal, vous laisse immanquablement un parfum d'éternité, de permanence des choses que vous retrouvez inchangées en dépit du passage du temps.
Dans un monde qui se gargarise de modernité, on y cultive invariablement le suprême raffinement de la conservation opiniâtre du suranné. Un tel havre de paisible immobilisme rassure et émeut dans la frénésie contemporaine.
La braise sommeille pourtant sous la cendre et la vibration indolente de la cité ne demande qu'à s'exacerber. Car pudiquement, derrière la pierre et le ceterach, Saint-Sever cache une âme de feu. Et cette âme ardente, rieuse et fière ne se dévoile nullement mieux qu'à travers la Peña Jeune Aficion.
Ses aficionados ont élevé la convivialité, la loyauté et la constance au rang d'art majeur.
Par amitié pour François (2 exemplaires du genre), Xavier, Vincent, Jeannot et tant d'autres qu'il serait trop long de citer, j'en fus membre fondateur, un privilège et une grâce.
J'aime leur simplicité, leur générosité, leur dynamisme, et cette manière inimitable de vous retrouver comme si l'on s'était quitté la veille, avec la même joie et le même sourire sincère.
J'aime aussi à ferrailler durant des heures dans des débats de comptoir forcenés, ponctués des indignations outragées de François ou des colères pagnolesques de Zaza: on se dispute pour mieux s'apprécier, on se collette pour mieux se rencontrer.
J'aime par dessus tout leur fidélité acharnée à un idéal et à une éthique tant morale que proprement taurine, qui se refuse obstinément à l'engourdissement et aux compromissions de la sénescence. La Peña Jeune Aficion a toujours su jalousement conserver le secret d'une éternelle jeunesse et trace imperturbablement sa route, sans prétentions et avec un inaltérable optimisme.
Les contraintes familiales et professionnelles m'avaient éloignées du pèlerinage obligé, de la cure de jouvence. Le dieu cornu m'y a de nouveau conduit.
Il est des lieux qui gardent la mémoire de ce qu'ils ont vécu, peut être en va t-il de même pour les dates.
Mon enfance fut imprégnée des récits terribles des anciens. De ceux qu'on écoutait d'abord avec effroi à 6 ans, puis poliment à 10, avant que d'envoyer paître les radoteurs à 18.
Il m'a fallu terminer mes études d'histoire, puis parcourir le site de l'ossuaire de Douaumont, pour comprendre que l'interminable plainte de mes aïeux poilus (sic), n'était que le faible et misérable écho des souffrances endurées.
Depuis, pour moi, il faut que sur chaque 11 novembre, se lève une aube blafarde et cafardeuse pour redire inlassablement à ceux qui sont et à ceux qui viennent, la mémoire de l'abominable tuerie et la perte irrémédiable d'un pan de notre ingénuité.
Avec la Grande Guerre, Marianne est devenue salope, comme depuis Auschwitz, on ne peut plus se duper, et à jamais, sur ce que l'Homme peut faire à l'Homme.
Les vieilles coquettes se font tirer la couenne pour tenter de cacher les outrages du temps, il nous faut absolument éviter que notre société ne camoufle tout aussi soigneusement ses cicatrices pour se persuader que le bonheur est possible. Depuis Verdun le bonheur n'existe plus vraiment. Auschwitz lui a donné le coup de grâce.
Pour les lucides, vivre, c'est aussi souffrir. Pour les masochistes c'est surtout souffrir. Pour les imbéciles, c'est ne jamais souffrir...
Faire la fête un 11 novembre revêtirait-il un arrière goût de sacrilège, un peu comme de banqueter le jour des Morts?
Maintenant je suis persuadé du contraire.
François m'avait collé un callejon dans la pochette. C'était tout lui! Il savait que je ne me serai jamais abaissé à lui demander ce genre de chose. Il savait aussi que cela me ferait plaisir. Comme il m'aurait régalé l'âme et le gosier d'un armagnac d'amitié.
Il y a quelques trente ans, la première fois que j'ai assisté à une corrida depuis le callejon, c'était parce qu'il me l'avait procuré, et c’était à Saint Sever.
Le callejon, c'est un plaisir futile que j'aime parfois à fréquenter, comme on s'encanaille dans les rues chaudes. Du callejon on comprend moins bien mais on ressent mieux, ou plutôt différemment.
Ce n'est vraiment pas le lieu d'où l'on dispose de la meilleure vision d'une course. On perd la perspective et la dimension tactique du combat, on ne distingue pas les distances, on ne réalise pas l'éloignement ou la proximité du toro et du torero.
Par contre, on vit en direct la fureur du toro, la sueur et la peur de l'homme. On découvre aussi tous les gestes des coulisses: les mozos qui lavent les épées avec la méticulosité de leur office, l'angoisse ou l'irritation de l'apoderado, l'attention paternelle du banderillero de confiance. On sort du rêve programmé pour entrer de plain-pied dans la contingence, dans un certain désenchantement nécessaire, qui naît des accrocs ou des couleurs fanées des trajes que l'on perçoit si magnifiques depuis les gradins.
L'optique du callejon explique notamment les dérives de beaucoup de nos chroniqueurs qui seraient mieux inspirés d'élever conjointement leurs constats, leurs pensées et leurs culs, pour suivre les opérations sous le même angle que leurs lecteurs, mais aussi que les présidences. L'éclairage étant différent, les points de vue évolueraient peut-être de même, encore que!
Mais c'est peine perdue, et si l'on n'y prend garde, au rythme où courent les choses, on déplacera bientôt les palcos dans la ruelle pour «mieux comprendre», «faciliter la communication», et éviter les regrettables bévues. On n'aura plus à les vilipender dans les reseñas puisqu'on aura eu tout le loisir de le faire in situ, pendant la corrida. Une évolution positive supplémentaire vers le toreo moderne!
Dans le callejon, ce qui est tout à fait répréhensible je le confesse, j'aime par dessus tout à poser le nez au ras des tablas, un peu comme on hume un civet en fin de cuisson, un vieux pauillac qu'on s'est longtemps retenu d'ouvrir, ou le vent du large à la proue d'un voilier (bien que je ne partage guère d'affinités avec Leonardo!).
Tout vous jaillit alors à la gueule, l'odeur sauvage du fauve, le déroulé et le ronflement sourd de ses muscles, le fracas métallique de son souffle sur le capote empesé, le chuintement de l'étoffe, le halètement de l'homme, le sable qui vole, l'éclat et la matière des regards, le sang qui gicle, la sueur qui perle, la puissance charnelle de l'animal, les déplacements choisis et félins du torero, le défi et la moue de ses lèvres. Tout prend corps avec une évidence et une inégalable acuité derrière la mince frontière de chêne.
Il faut oeuvrer pour que tout aficionado connaisse un jour ces sensations si complexes et si intenses. Las! La justification du callejon n'est nullement fonctionnelle, mais avant tout sociale: il importe de se distinguer, d'appartenir à la caste, à l'élite, de jouir d'un privilège dont les autres sont dépourvus.
Merci François pour ce sésame, car pour toi, comme pour moi, ces détails là ne constituent pas un brevet d'honorabilité, mais le passeport exceptionnel pour entrer dans la substance des choses.
Et j'y suis entré!
Les copains avaient bien préparé les opérations, comme il convient à des aristocrates de l'aficion de verdad. Un lot de quatre chipendales, signé La Constancia, bien sous tous rapports, et plus si affinités! Deux toreros andalous, fleuris des ultimes géraniums sévillans (Mario DIEGUEZ, A.Jesus ESPALIU), un jeune apache salmantin, avatar probable de Santiago Martin (Juan del ALAMO), et le régional obligé de l'étape (Matthieu GUILLON).
N'ayant ni la mémoire, ni le désir d'une reseña, mieux vaut traduire l'instant, tel que je l'ai ressenti.
Nimbé d'exhalaisons de brumes froides, dans la lumière crue des projecteurs qui corrompaient la nuit tombante, Juan DEL ALAMO affrontait le dernier novillo.
La gravité sempiternelle de son visage livide d'où toute joie semble proscrite, le calme imperturbable dont il ne paraît jamais se départir, l'étrange assurance qui l'habite, comme si rien ne pouvait contrarier son savoir et sa volonté, contrastent avec la juvénilité des traits.
La scène avait des relents de rêve ou de mémoires brusquement avivées. Il y avait là, la réminiscence de ces souvenirs qui ne nous appartiennent pas mais nous sont légués par l'anamnèse collective. J'ai revu la désolation lunaire des côtes de Marne éblouie des fusées éclairantes au moment de l'assaut nocturne: c'était Verdun, c'était le Chemin des Dames, c'était la Tranchée des baïonnettes. C'était la commémoration de la jeunesse qui lutte et se bat jusqu'au bout contre l'adversité. C'était l'hommage aux jeunes gars tombés dans la boue et le sang pour des chimères, pour conquérir dix toises de terrain, pour sauver le drapeau, pour rapporter le cadavre meurtri du camarade.
Le novillo coupait les terrains. Avisé? Malvoyant? Qu'importe! Parmi le quatuor, seul Juan pouvait par sa détermination, sa technique et son sens de la lidia, soumettre et dominer un tel adversaire. Le destin avait, à sa manière, bien disposé du sorteo. Aux autres étaient échus les brouettes, à lui étaient réservés l'outrage, le dépassement et le triomphe sur l'adversité.
Deux fois accroché, il se relevait avec l'esquisse d'une grimace, vite dissimulée sous le masque de l'impavidité, et mobilisant sa science, son jugement et sa résolution, se jouait de l'anicroche pour remonter au front et changer le destin.
Le garçon bousculé, humilié par la fureur du toro borgne ne cédait rien et surtout pas l'honneur. La temporada se terminait et il se battait avec la farouche obstination d'un commencement, comme il lutte avec chaque toro. Avec la même application et la même fougue contenue qu'un jour d'alternative.
La ténacité, l'intelligence du combat, l'efficacité pénétrante des passes, venaient graduellement à bout de la violence des assauts, de la sauvagerie des derrotes.
Enfin ce fut une estocade approximative mais engagée et contraire.
La gravité sempiternelle de son visage livide d'où toute joie semble proscrite, le calme imperturbable dont il ne paraît jamais se départir, l'étrange assurance qui l'habite, comme si rien ne pouvait contrarier son savoir et sa volonté, contrastent avec la juvénilité des traits.
La scène avait des relents de rêve ou de mémoires brusquement avivées. Il y avait là, la réminiscence de ces souvenirs qui ne nous appartiennent pas mais nous sont légués par l'anamnèse collective. J'ai revu la désolation lunaire des côtes de Marne éblouie des fusées éclairantes au moment de l'assaut nocturne: c'était Verdun, c'était le Chemin des Dames, c'était la Tranchée des baïonnettes. C'était la commémoration de la jeunesse qui lutte et se bat jusqu'au bout contre l'adversité. C'était l'hommage aux jeunes gars tombés dans la boue et le sang pour des chimères, pour conquérir dix toises de terrain, pour sauver le drapeau, pour rapporter le cadavre meurtri du camarade.
Le novillo coupait les terrains. Avisé? Malvoyant? Qu'importe! Parmi le quatuor, seul Juan pouvait par sa détermination, sa technique et son sens de la lidia, soumettre et dominer un tel adversaire. Le destin avait, à sa manière, bien disposé du sorteo. Aux autres étaient échus les brouettes, à lui étaient réservés l'outrage, le dépassement et le triomphe sur l'adversité.
Deux fois accroché, il se relevait avec l'esquisse d'une grimace, vite dissimulée sous le masque de l'impavidité, et mobilisant sa science, son jugement et sa résolution, se jouait de l'anicroche pour remonter au front et changer le destin.
Le garçon bousculé, humilié par la fureur du toro borgne ne cédait rien et surtout pas l'honneur. La temporada se terminait et il se battait avec la farouche obstination d'un commencement, comme il lutte avec chaque toro. Avec la même application et la même fougue contenue qu'un jour d'alternative.
La ténacité, l'intelligence du combat, l'efficacité pénétrante des passes, venaient graduellement à bout de la violence des assauts, de la sauvagerie des derrotes.
Enfin ce fut une estocade approximative mais engagée et contraire.
Son visage enfantin de voyou triste, qu'on aurait cru tiré d'un film de Pasolini, conservait la même austère impassibilité et s'étoilait des poussières du ruedo noyées de sueur.
Dans l'aura de buée, nul sourire, seulement un regard acéré...
Ainsi advient-il parfois dans les crépuscules automnaux de Gascogne des bribes de songes héroïques et vains.
Dans l'aura de buée, nul sourire, seulement un regard acéré...
Ainsi advient-il parfois dans les crépuscules automnaux de Gascogne des bribes de songes héroïques et vains.
Xavier KLEIN
5 commentaires:
il y a des tardes de parapluies qui laissent un goût , une odeur inimitable, singulière. celle de cette année au cap de gascogne en fait partie. peut-être parce que novembre...
ole el arte y la planta de mi peña ! ole tu oracion xavier !
quant à la der des ders, je viens de voir un formidable "objet" à base d'archves , de photos, d'extraits de films intitulé "le bruit et la fureur" sur f2 qui laisse exangue. l'horreur immonde à l'état brut. pourtant les codes déontologiques du docu , même fiction, sont un peu outrepassés colorisation postsynchro audio, mélange très patchwork des genres filmiques...). mais la narration fonctionne. ce type de boulot appuie la thèse du consentement résigné.l'as-tu vu et qu'en penses-tu en tant qu'historien (si j'ai bien suivi) ?
un salut,
ludo
ps : si j'avais su on aurait pu boire un godet ensemble. entre deux gouttes s'en envoyr une autre quoi !
Je l'ai vu aussi: tout à fait remarquable! Un excellent film de vulgarisation intelligent et sensible. En sus, la couleur donne de la vie et nous rend ces pauvres gars plus proches. Je trouve que les innovations techniques que tu évoques sont de nature à intéresser un public jeune qui peine avec les films d'époques, donc pour les toucher, à tous les sens du terme, c'est parfait!
Dommange pour le verre manqué!
A propos de la journée, j'ai filé un coup d'oeil à l'Echo du Callejon: c'est pathétique ce truc là, vulgaire, mal écrit, bourré de fautes, en un mot putréfactif!
l'écho du callejon est un étron taurin, non, même pas taurin (si, quelques intervenants au forum qui persistent, je me demande s'il ne s'agit pas d'avatar pour faire semblant d'agiter le "débat", des leurres quoi !).
mais bon, le net c'est ça.ceci dit, mundotoro publie ces derniers jours un "repassé" des ambitions ou des orientations "animalistes" des différents totalitarismes pour soi-disant confondre les antis. c'est là aussi pathétique et dans l'air du temps qui victimise tout : en clair nous serions victimes ( dans le cas des attaques visant à supprimer ou à réduire la corrida)de futurs polpot, hitler et staline réunis(en gros ce qui va des antispécistes ou gentils écolobobos).
une fois de plus on utilise la grosse ficelle pour cacher la mèche qui est alumée dans notre propre camp. et si tu n'es pas avec eux c'est que tu es contre eux, donc tu es un anti genre rouge/brun.démentiel !
un abrazo.
ludo
Etron, étron, petit patapon!
Comme un con et rien d'autre j'y étais pas,mais rassures toi à la toussaint non plus et le jour des morts igual,mais je vais pas te dire que j'ai des regrets puisque coupable ,mais j'ai une pensée de cette pena ,plus pres du quinqua que de los veinte,mais l'aficion n'a pas de prise sur l'age et ces garçons sympas et les filles itou qui vont au cloitre des Jacobins que pour parler toros,essaient de faire perdurer un évévement incontournable de l'aficion du Sud Ouest avec un programme alléchant et à lécher mais los "pobritos" sont pas récompensés car c'est pas des ripailles gartantuesques comme à Rion,non le menu du jour si je puis dire ... des pinchos ,eh oui Ludo ,savamment faits et une semana grande de aficion à faire palir Sansé mais las moi le premier suis un burro et vais pas chercher le truc ,le machin ,la parole que tu trouves pas ni dans les tertulias nombrilistes ni dans les callejons !!!!!!!!!!!!!!!!!!!
bourres de "je suis la secretaire de Monsieur" et tout le mundillo de mierda.
In fine bravo à eux et merde aux autres deboussoles sans leur trilogie daxmounbayonnaise.
Allez un saludo a todos mis companeros
bruno
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