Humeurs taurines et éclectiques

jeudi 18 décembre 2008

EMPRESAS, LA COURSE A L'ECHALOTE

Faut-il s'étonner de l'intérêt tout particulier que certains affichent pour le résultat des adjudications en cours dans nombre de plazas françaises du sud-ouest?
De part et d'autres les grandes manoeuvres sont engagées, on engage l'artillerie, on fait donner la garde pour colmater les brèches, on forfante, on macchiavélise au petit pied, on spadassine à tout va. Les grands fauves sont lâchés, les chiens courants aussi.
On ne voit pas que la blogosphère réellement aficionada se passionne réellement pour ces démêlés qui procéderaient avant tout de l'anecdote, du chiste, ou du feuilleton de Dallas sur Nive ou sur Midouze, s'ils ne supposaient des conséquences fâcheuses.
Peut-être y a t-il là toute la différence entre l'aficion, la vraie, et les tenants du «complexe médiatico-taurin», entre ceux qui pensent toros, et ceux qui en profitent.
Que peut nous importer vraiment que Simon Jalabert triomphe d’Oscar Casas ou de Marie Sarah Chopera? Ces gens là ne donnent pas dans la philanthropie militante, la tauromachie est le paravent de leur industrie. L'objet véritable de leur convoitise ce sont avant tout les profits qu'on peut en retirer. Affirmant cela, je ne sous entend aucun jugement de valeur, aucune condamnation des intéressés, je rappelle seulement une vérité indéniable sur une profession par ailleurs respectable.
Ces imbroglios en tout genres ont toutefois le mérite de dévoiler clairement les intérêts souterrains, longtemps camouflés, de certains commentateurs polymorphes, qui confirment clairement qu'ils ne se sont jamais contentés d'observer.
Le week-end dernier, se tenaient les assises de l'U.V.T.F. en la bonne et belle cité d'Arles. Hors les débats convenus -mais cette auguste assemblée n'a jamais fait figure de dangereux nid de révolutionnaires- on y put faire des rencontres chaleureuses et enrichissantes.
Deux conversations furent particulièrement éclairantes.
Questionné sur les raisons qui peuvent conduire les élus d'une grande ville taurine provençale à concéder une plaza renommée et d'évidence rentable à une empresa privée, un magistrat municipal répondit en termes politiques et financiers.
Politiques du fait qu'il s'agissait pour les édiles de mettre fin à une confusion excessive entre une activité taurine, somme tout marginale dans le destin économique d'une ville, et la gestion globale de la cité. Le mariage de la furor taurina et l'incandescence du tempérament méridional marginalisaient des problèmes futiles comme la politique culturelle, les enjeux sociaux, le logement ou l'économie au profit des disputes taurines, entretenues par une nébuleuse de peñas et clubs en tous genres, où chacun prêche pour sa chapelle, sa tauromachie, son grand homme. En outre, les élus étaient soumis à des pressions constantes et intolérables pour prendre fait et cause dans des débats très éloignés de leurs mandats et de leurs attributions.
Financiers, car l'aficionado n'en étant pas moins homme, le budget municipal pâtissait fortement du déficit généré par une gestion disons approximative et trop impliquée dans l'humain. Désormais, les arènes rapportent, alors qu'elles coûtaient.
La deuxième conversation fût des plus éprouvante. Honteusement retenus en otage par deux terribles activistes ayatollesques de Campos y Ruedos, soumis à la question par l'ingestion répétée de breuvages locaux (dont un délicieux Crozes Hermitage si je me souviens bien), traînés en place publique devant un amphithéâtre antique et néanmoins illuminé, rien ne nous fût épargné.
L'évangélisation des terres lointaines comporte des risques et nous étions résolus au martyre pour tenter d'apporter quelques lumières aux peuplades indigènes plongées dans l'erreur.
Ainsi nous nous efforçâmes d'évoquer les efforts de la Commission Taurine d'Orthez, cité petite par la taille mais grande par les espérances, pour accéder à un mode de gestion directe qui fasse fi des grands monopoles.
Quelle ne fût pas la stupéfaction des sympathiques autochtones devant tant d'audace et de témérité: il y a t-il une vie possible sans Chopera, Casas et consorts? Il nous fallut bien des efforts pour persuader ces idolâtres que la voie de la rédemption bien qu'étroite et périlleuse reste praticable pour les tenants de la Vraie Foi.
Aujourd'hui, nous pouvons le confirmer, les décisions ont été prises, les arbitrages rendus, Orthez gérera ses activités taurines de manière autonome, seules certaines procédures trop techniques et complexes feront l’objet d’un mandat.
Il n'est pas question ici d'en faire la réclame. Seulement de confirmer qu'il existe d'autres destins possibles que de s'en remettre aux grandes empresas.
Deux cas de figures se présentent en général:
* Celui des grandes plazas qui mobilisent des budgets importants. Ces cités de traditions taurines ne manquent pas des ressources humaines compétentes qui pourraient oeuvrer à l'élaboration des cartels. Elles peuvent également affecter du personnel à la mise en oeuvre pratique des choix retenus et à l'aboutissement des procédures complexes ci-dessus évoquées. Cela crée des emplois locaux, cela permet de savoir ce que l'on paie et à qui on le paie. Enfin, et cela ne constitue pas le moindre des avantages, cela donne un pouvoir et une indépendance insoupçonnés au donneur d'ordre. Un ganadero devient tributaire de ce dernier et non d'une empresa qui a d'autres intérêts et d'autres préoccupations. Il en va de même, dans une moindre mesure, pour les toreros. Comme l'évoque le dicton: c'est celui qui paye qui commande!
* Celui des petites arènes qui organisent un nombre limité de spectacles. Tout le travail repose alors sur une équipe motivée et soudée, et sur des services municipaux qui doivent effectuer la dizaine de démarches indispensables au montage d'une corrida. Il ne faut ménager ni son temps, ni sa peine, mais le résultat en vaut la peine: une économie substantielle de 8 à 20% qui peut éviter le déficit, et surtout l'accès au libre choix.
Comme toujours, le principal obstacle à la généralisation des gestions directes, comme le principal obstacle à tout processus d'émancipation, c'est la peur, une peur fondée sur le fantasme et l'ignorance savamment entretenue par les réseaux appointés. Marcher seul représente une prise de risque, un pas vers l'inconnu qui effraie. C'est une éternelle et universelle répétition depuis le mythe de la caverne de Platon.
Maîtriser les informations, les données, suppose des savoirs, des savoirs faire qu'il est ardu d'acquérir, car la loi du silence s'impose et que ceux qui les détiennent n'ont aucun intérêt à les partager, bien au contraire.
La liberté, la dignité, l'indépendance ont un prix. Elles sont également un enjeu. Un enjeu qui ne concerne pas qu'Orthez. Rompre avec les diktats d'un système taurin dont on sait l'opacité, les pratiques malsaines, les compromissions douteuses représente un espoir pour une autre tauromachie plus sincère et authentique.
La gestion directe ne saurait incarner la panacée. Il y a sans doute le revers de la médaille. L'exemple en la matière nous vient de Dax, dont en dépit des critiques, on ne dira jamais assez que parmi les grandes plazas de France, d'Espagne et de Navarre, elle demeure la seule à se gouverner librement. Dax, qui ne cotise pas au racket empresorial connaît un succès dont rêvent bien des plazas voisines, et plus lointaines...
Dax nous montre aussi que l'exigence de rentabilité, la dictature du public moderne imposent des accommodements bien contestables.
Sans doute le noeud du problème réside t-il ailleurs, dans la formation, ou la déformation, c'est selon, des goûts des spectateurs par le travail de sape des revisteros complices. Le fameux article phare de Dubos sur les ayatollahs devrait nous éclairer à ce sujet.
Il serait nécessaire, vital même, d'en prendre conscience et d'explorer les voies d'une information et d'une pédagogie émancipées des tutelles commerciales et des intérêts du mundillo.
Y sommes-nous résolus?



Xavier KLEIN

2 commentaires:

Anonyme a dit…

dubosq ? tu veux dire dubos, andré-marc, fils de georges , non ?
ou alors cet ectoplasme de franck duboscq aurait commis un "sketch" sur les ayatollah de la fission ?
nonobstant je te suis à cien por cien (même et surtout sur lr crozes-hermitage). que ce soit fulano ou mengano, ils sont de la même engeance. respectable; mais comme on dit là-bas, qu'ils ne fassent pas confondre "chorras y merinas".
les faux prophètes s'habillent tous en faux agitateurs. déshabillons-les et on verra que le dressing est vide.
bien à toi.

ludo

Xavier KLEIN a dit…

Correction effectuée.
Effectivement je travaille souvent avec un Dubosq (en fait Duboscq).
Menfin quoi! Dubois en gascon (la gaffe)