Je viens de puiser dans mon stock de lectures en souffrance et d’achever de dévorer tout d’un trait un ouvrage tout à fait instructif, quelque peu passé inaperçu à l’époque de sa parution, hormis de l’acuité aquiline du camarade Charles CREPIN (http://vingt-passes-pas-plus.over-blog.org/article-ecrits-sur-les-toros-33725948.html).
Un véritable régal qui se lit d’une traite tant par le choix du point de vue de l’auteur que d’une culture brillante, servie par un humour omniprésent et une langue superbe. Enfin du bon français!
Emmanuel de Monredon nous sert une anthologie de la taurophobie à travers les âges émaillée d’anecdotes et de détails des plus savoureux.
Un ouvrage fort nécessaire en ces temps où l’on se prend parfois à douter et à se laisser envahir par des mauvaises ondes pessimistes.
On s’aperçoit qu’il n’est rien de nouveau sous le soleil et que les arguments de la coterie anti-taurine, comme ceux des aficionados d’ailleurs, n’ont guère évolué depuis les lustres les plus antiques.
Des prélats préoccupés que les toros n’envahissent leurs sanctuaires à Saint Brigitte de la Madrague, en passant par les représentants en mission de la Convention préoccupés de préserver la vie de leurs citoyens-soldats, ils s’en prirent tous à la «subversion tauromachique», à cette passion viscérale qui concurrençait tant leur propre passion totalitaire.
Ces arguments, ces ressorts relèvent le plus souvent de l’ordre public et moral ainsi que de la volonté forcenée des bien-pensants de contenir à tout prix toute exubérance dionysiaque qui viendrait à perturber leur hyper-rigité apollinienne. On fait alors feu de tout bois, la psychiatrie ou la psychanalyse constituant pour certains le plus récent des combustibles, même au prix de leur dévoiement. Heureusement que ces honorables disciplines comptent autant de chapelles, de dissidences et d’hérésies que notre Sainte Mère l’Eglise catholique, apostolique et romaine.
On prend ensuite conscience que nous ne vivons pas le moment le plus terrible de l’histoire taurine, il y a eu bien pire sous l’Ancien Régime, la Révolution et à la Belle Epoque, à des époques où des pouvoirs centraux voulaient s’imposer toujours au nom de la vertu!
Depuis des siècles on s’évertue à éradiquer la tauromachie et depuis des siècles elle résiste invariablement. Il y eut des crises, des prohibitions, mais tel le phénix, le toro brave est toujours ressuscité de ses cendres. Les mythes, les rites, les pulsions profondes de l’Humanité ont la peau dure, d’autant plus dure que sans eux, l’Humanité ne serait pas.
Du moins une Humanité complexe, luxuriante et riche telle que nous sommes nombreux à continuer immuablement à la concevoir.
Xavier KLEIN
«Le regard des choses. Histoire française de la taurophobie» Emmanuel de Monredon, 2007 par l'U.B.T.F. 301 pages.
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