Fuera de cacho................................ |
Toujours passionné par le sens que l’histoire d’un
mot et son étymologie confèrent à son actualité, autant que je le puisse, je
passe en revue le glossaire de l’arène.
C’est une tache difficile car je ne suis nullement
un linguiste distingué, loin de là!
Mes études hispaniques s’étant réduites au strict
minimum (un año de «grand commençant» en classe de terminale), et n’étant
nullement doué pour l’apprentissage des idiomes, je baragouine un espinguès
approximatif et laborieux. Je ne parviens à l’entendre qu’après avoir
consciencieusement abreuvé mon interlocuteur de «despacio, por favor»
(lentement, s’il vous plait). Une précaution parfaitement vaine avec les
andalous, créatures étranges et loquaces qui se soucient en général très
modérément d’être comprises…
Après 7 ans d’anglais, je ne suis toujours pas
rosbifnophone. Je lis couramment et manie le godon sans trop de tribulations,
mais quand il s’agit d’entraver, c’est Trafalgar et Waterloo united. Et pour
peu que l’interlocuteur soit un amerloque, c’est à dire un andalou anglais (la
comparaison étant exclusivement phonétique!), là, je joue panique à bord.
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Non, moi, mon truc, c’est l’archéologie des
langues.
C’est pourquoi, bien qu’étant aussi nullissime en latin et en grec que
dans leurs héritières modernes, j’ai toujours conçu une immense félicité à leur
fréquentation, ce qui s'est avéré fortement avantageux pour l’abord de l’espagnol,
de l’italien ou du portugais. Une fois sur deux, on y parvient à retrouver un mot
inconnu grâce au recours à un radical latin, ce qui est impossible avec les
langues septentrionales, germaniques ou anglo-saxonnes.
Il en va de la langue comme des peuples: la
«pureté» n’existe pas. C’est au contraire par leur dynamisme interne et leur
interaction avec l’«autre» qu’elles évoluent, se transforment et «vivent». Une
langue qui n’évolue pas est une langue qui se meurt.
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Ces avatars sont réellement passionnants et
transcrivent dans la modernité les relations historiques intra et inter-nationales.
Le mot «barbecue», par exemple, est le
témoignage d’un aller-retour avec l’anglais. «Barbecue» -honi soit qui
mal y pense- est l’adaptation anglaise d’une pratique de l’embrochement de «la
barbe à la queue» bien gauloise, comme paquebot est celle du grand breton «pack
boat».
Outre Pyrénées, l’histoire a également marqué la
langue. L’émergence des Habsbourg et d’un empire-mosaïque sur lequel «le
soleil ne se couchait jamais» a engendré une cohabitation des cultures.
Les reîtres et lansquenets mercenaires du Saint
Empire Romain Germanique cohabitant avec les
tercios ibères communiquaient dans un sabir qui a laissé des traces.
Ainsi, les premiers aillant coutume de se lisser la moustache en s’exclamant «Bei
Gott!» («Por Dios!» en espagnol et «Pardieu!» en français),
les seconds en conclurent que c’était là l’appellation de l’appendice pileux. «Bei
Gott!» est donc devenu «bigotes» en castillan.
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La tauromachie n’a pas échappé au mouvement.
Ainsi, cherchant l’origine du mot «brindis»,
dont je ne parvenais à trouver aucune source latine, j’eus la surprise de
découvrir qu’il provenait de l’allemand «bring
dir's»
(«je te l’offre»). Les fridolins avaient encore sévi!
Ce
travail de recherche de l’origine du jargon taurin, de ses expressions
spécifiques ne revêt pas seulement un aspect anecdotique, il révèle un sens
profond, une histoire, des influences.
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J’ai
toujours été intrigué par le mot «cacho», dans l’expression «fuera de
cacho». En fait, ce mot peut se décliner non seulement sous diverses
acceptions, mais relever de plusieurs étymologies.
Le
verbe correspondant «cachar» est d’origine d’Amérique du Sud (Chili,
Colombie) et signifie «cornear» (donner des coups de cornes).
Il faut
savoir que les ex-colonies espagnoles (comme c’est le cas pour la France)
pratiquent souvent un espagnol à la fois plus archaïque, plus pur ou plus
soutenu que dans la mère-patrie. Il suffit de fréquenter un peu des québécois,
des lettrés de la francophonie, antillais ou africains pour constater la
pratique d’une langue plus subtile et plus châtiée que le français
métropolitain. J’ai toujours ouï dire que le castillan de Colombie était
particulièrement relevé.
Dans
cette optique, on notera que deux occurrences de «cacha» (nom féminin de
cacho) abondent dans ce sens:
CACHA1
(Du latin capŭla, pluriel de capŭlum,
poing, poignée).
1.
Revêtement (de corne) qui couvre
le manche des «navajas», de certains couteaux et de quelques armes à
feu.
2.
Manche de
couteau ou de «navaja».
3.
De Cachete (joue).
Mais également poignard.
4.
Fesse. Portion charnue et rebondie.
CACHA2
1.
Colombie: Corne.
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Le
nom commun «cacho» dans l’une de ses occurrences, rejoint tout à fait «cacha»,
mais la déclinaison des significations, porte également
très humoristiquement un sens qui peut s’adapter à la situation d’un torero ou d'un toreo «fuera de cacho».
CACHO3
1. Amérique. Corne.
2. Amérique
du sud. Timbale de corne.
3. Bolivie
et Colombie. Jeu de hasard.
4. Chili
et Guatemala. Corne.
5. Chili
et Pérou. Rebut, chose inutile et méprisable.
6. Chili. Corvée,
travail pénible et inopportun.
7. Colombie argotique. Joint,
pétard. Cigarette de marijuana.
8. Equateur.
Plaisanterie, historiette, en général obscène.
Ainsi
«fuera de cacho» qui en jargon taurin se traduirait par «en dehors de
la corne» ou «hors la corne», pourrait aussi
diversement signifier dans un jeu du mot: «hors du poignard», c’est à dire hors du danger,
qui rejoindrait alors «hors de la fesse», ce qui indique l’éloignement du
péril.
Nous
avons aussi le «hors du jeu» ou «hors jeu» trop souvent actuel et
le «hors de la corvée, du travail pénible» qui s’avère explicite. Et «hors
de la plaisanterie», dont, comme chacun le sait, les plus courtes
sont les meilleures.
Par
contre toréer «fuera de cacho» provoque un certain nombre de «pétards»,
même si d’un autre côté, la chose n’a rien du psychédélisme induit par un bon
joint de marijehane. Notons que le mot «joint, pétard» se traduit aussi en
argot mexicain par «cucaracha» (qui signifie aussi «blatte, cafard»).
C’était le surnom du général-président aztèque Victoriano HUERTA,
alcoolique, cannabique et sale comme un cancrelat après ses abondantes et fréquentes
libations.
Refrain :
La cucaracha, la cucaracha,
Ya no puede caminar ;
Porque no tiene, porque le
falta
Marijuana que fumar
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Refrain :
Le pétard, le pétard, (ou le
cafard, le cafard)
Déjà ne peut plus marcher ;
Parce qu'il n'a pas, parce qu'il
lui manque
De la marijuana à fumer
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Les
mots dans leur crudité, dans leur subtile variabilité font plus que parler. Ils
hurlent des vérités que nous nous refusons trop souvent à entendre.
Xavier
KLEIN
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4 commentaires:
je nbe suis pas spûr de la traduction "déjà ne peut plus marcher".
La prochaine fois que je vais en Andalousie, je vous ramène une paire d'oreilles (sans difficulté si je vais voir Manzanares dans la Maestranza) que l'excellent Professeur Lafeuille vous greffera. Dès lors vous pigerez tout de l'andalou.
Je peux aussi vous ramener une queue... Non ? Sans façon ? Bon.
A bon entendeur salut !
JLB
bringe dich : je te l'apporte
Trouvé à l'article Brindis du Dictionnaire de l'Académie Royale espagnole.
Sans doute du vieil allemand...
http://lema.rae.es/drae/
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