Humeurs taurines et éclectiques

vendredi 23 octobre 2009

HIATUS MALTAPROPOS

Nicolas BOILEAU
« Je vais ou je vas mourir, l'un et l'autre se dit ou se disent.»

prêté à Claude Favre de Vaugelas, à l'heure de son trépas.

Jean François m'a récemment aimablement brocardé au sujet d'un point d'orthographe, sur lequel je l'avais envoyé paître sans aménité.
En effet, j'avais employé l'expression «sa ire», et il me faisait remarquer qu'on disait «son ire» (comme on dit «son âme»).
A l'écriture, l'expression m'avait passablement raclé le tympan et, j'avais consulté un ami et collègue agrégé es lettres à ce sujet. Sans doute un peu distrait, il n'avait sur le coup, rien trouvé à redire. Donc Jean François fut prestement et mâlement envoyé aux pelotes.
Il s'avère que Jean François avait raison et me voilà dans la nécessité, en chemise et la corde au cou, comme un empereur d'Allemagne, de faire de bonne grâce amende honorable, et surtout de remercier Jean François de m'aider à améliorer mon écriture.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Hiatus
J'en profite pour vous appeler à me signaler toute faute que j'omettrais.
En effet, avec l'âge, je constate que mon orthographe tend à se dégrader. Alors que jusqu'à présent, je jouissais de la grâce, ô combien imméritée, de ce que l'on appelle une orthographe naturelle, c'est à dire que le repérage des fautes s'effectuait par le constat que «quelque chose ne colle pas» à la relecture, sans que je pusse toujours me référer à une règle précise pour expliquer ce qui clochait et pourquoi.
Cette exigence d'une recherche de la belle langue semble passer pour certains, soit pour de l'emphase, soit pour de la prétention, voire pour du snobisme.
Je reconnais volontiers une prétention, celle de vouloir bien manier l'une des plus belles langues qui soient (
http://www.guichetdusavoir.org/ipb/index.php?showtopic=9699).
Ce n'est certes pas très...moderne, cela ne m'attire pas non plus foule de lecteurs comme certaines officines callejonesques qui revendiquaient récemment des milliers de contacts quotidiens, mais je suis par nature, par goût, par conviction et par profession attaché à quelques exigences dans ce domaine.
Je dois humblement avouer, être irréversiblement allergique à la démagogie orthographique et à l'éloge du SMS.
«Verba volent, scripta manent» (Les paroles s'envolent, les écrits restent.).
Il importe donc de s'essayer à des écrits de qualité, sinon sur le fond, où rien ne nous préserve de l'erreur ou de la bêtise, au moins sur la forme.
Ceci dit, nous avons la chance d'user d'une langue riche et variée, une langue qui inclut aussi bien le parler parfait d'un Flaubert, que la diversité et la créativité d'un Rabelais, d'un Céline, d'un Queneau, d'un Audiard ou d'un Frédéric Dard, tous auteurs que je révère. Et ces diverses formes d'expressions de la vigueur linguistique méritent toutes d'être explorées et exploitées, sans exclusives, tout comme en matière de tauromachie.
Merci à mes maîtres de m'en avoir donné, sinon l'emploi accompli, du moins le goût.
Sans disserter longtemps sur le thème (j'ai en horreur l'onanisme de certains à évoquer leur écriture et ses ressorts), il me faut avouer que l'exercice ne m'est guère aisé. Les premiers jets sont particulièrement lourds et empesés. Sans doute du fait de vouloir trop dire. Et il me faut élaguer et simplifier à plusieurs reprises pour parvenir à un écrit à peu prés comestible. Voilà en fait une excellente discipline de l'âme qui conduit à brider les méandres hasardeux de la pensée pour la contraindre à l'essentiel et au plus dur des arts: celui de la simplicité (que je suis astronomiquement loin de maîtriser...).
Merci à l'ordinateur de le permettre, sans passer par une consommation excessive de papier et de brouillons.
Voilà un an au 15 du mois, que le blog fonctionne. Je ne pensais pas être capable de tenir aussi longtemps, et avec une si relative régularité.
Vous m'y avez encouragé, et je suis souvent sincèrement surpris de l'intérêt et de la fidélité de beaucoup d'entre vous, ainsi que des liens cordiaux et féconds noués au fil du temps.
Sans autre prétention que de partager des analyses, des états d'âmes, des constats et parfois des provocations (autant à la réflexion qu'à l'indignation), le suivi de ce blog m'apporte un grand plaisir et sollicite de ma part un effort salutaire.
Puisse t-il continuer à vous intéresser.


Xavier KLEIN


Aimez donc la raison : que toujours vos écrits
Empruntent d'elle seule et leur lustre et leur prix.
[...]
Quoi que vous écriviez, évitez la bassesse
[...]
[...] Soyez simple avec art,
Sublime sans orgueil, agréable sans fard.
Il est certains esprits dont les sombres pensées
Sont, d'un nuage épais, toujours embarrassées;
Le jour de la raison ne le saurait percer.

Avant donc que d'écrire, apprenez à penser.
Selon que notre idée est plus ou moins obscure,
L'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément.
[...]
Hâtez-vous lentement ; et, sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage.
[...]
Soyez-vous à vous-même un sévère critique.
L'ignorance toujours est prête à s'admirer.
Faites-vous des amis prompts à vous censurer;
[...]
Mais sachez de l'ami discerner le flatteur.
[...]
Aimez qu'on vous conseille et non pas qu'on vous loue.
[...]
L'ouvrage le plus plat a, chez les courtisans
De tout temps rencontré de zélés partisans;
Et, pour finir enfin par un trait de satire,
Un sot trouve toujours un plus sot qui l'admire.
Nicolas BOILEAU "Art poétique. Chant I"

dimanche 18 octobre 2009

PILAR 2009

Quelques clichés pris sur le vif lors de l'expédition à Saragosse les 16 et 17 octobre (Dolores AGUIRRE, MIURAS).
Sans prétentions.
Ils n'ont pas la qualité des productions des maîtres CyRiotes.
D'autant, qu'horreur, j'use parfois du mitraillage, ce qu'un puriste ne saurait supporter. Ils ne visent en rien à rendre la beauté plastique d'une passe, plutôt à saisir un instant, une posture, un détail qui tire l'oeil, une incongruité.
En outre, la lumière artificielle de l'arène couverte dénature les couleurs, d'où le recours au bon vieux noir et blanc.
Joselillo dans ses oeuvres. D'aucuns lui trouvent des airs de parachutiste, je pencherai plutôt vers le légionnaire romain. Dans tous les cas, ses manières de belluaire, sa mâle résolution lui permirent de tirer parti honorablement de l'après-midi.
Une après-midi d'Aguirre intéressante, mais marquée par la mansedumbre et surtout par le sempiternel constat de l'incapacité de la toreria actuelle à lidier ces toros difficiles, si éloignés du prêt à toréer actuel. On aura compris que par lidier, il ne faut nullement entendre l'alignement réglementaire des 50 passes liées indispensables à la satisfaction du public (et même de l'aficion) moderne.
Serranito dans les choux, Robleño "fatal". Panique à bord quoi...
Et pendant que le Titanic coulait, l'orchestre jouait.
Evidemment, ce n'est pas en déchargeant la suerte de cette manière, en se découvrant et en ne se croisant jamais qu'on peut espérer dominer des toros con genio (une vingtaine de photos encore moins charitables le confirme).
La finesse de Serranito ne s'acommodera guère plus de ces cactus.

Il y eût un jour, il y eût un soir, il y eût un matin (difficile), premier jour.




N'allez pas croire les fadaises, qu'on lit sur maints journaux et blogs du système, il n'y avait, à grand peine, qu'une grosse moitié d'arènes. Une pitié pour un samedi de miuras.

Pas de miracles pour le petit Jesus (Milian)
Encore moins pour un autre torero de la tierra, Alberto ALVAREZ, qui n'avait que son courage à opposer aux deux adversaires les plus incommodes.





Seul sous le dais, Rafaelillo disposait de la technique, de la pratique, et de l'expérience pour fort bien et valeureusement toréer son premier, et de la rouerie et du mauvais goût pour chaparder une oreille de pueblo à son second.



Conclusion déprimante pour ma part. Cette détestable hypocrisie, sous couvert d'introduire dans des cartels des toreros locaux, en fait de faire des économies pour financer les vedettes du reste de la feria, devient insupportable.
Jouer avec la peau et l'aficion de momes qui n'ont que 2 ou 3 corridas dans les pattes est proprement ignominieux.
Pendant ce temps les figuras se coltinent les carretons les plus commodes...
Il fût un temps où, dans une grande feria, les têtes d'escalafon se seraient disputées les miuras, pour l'honneur.
Mais il paraît qu'on a jamais si bien toréé...
Décidemment la tauromachie me paraît parfois comme le monton de fleur de la Vierge du Pilar après 5 jours de fêtes: bien défraichie!


mardi 13 octobre 2009

LES CHTIS TAURINS

«Les envahisseurs: ces êtres étranges venus d'une autre planète. David Vincent les a vus. Pour lui, cela a commencé par une nuit sombre, le long d'une route de campagne, tandis qu'il cherchait un raccourci que jamais il ne trouva. Cela a commencé par une bodega et par un homme que le manque de sommeil avait rendu trop las pour continuer sa route.»
Vous voyez ce que je veux dire? Vous avez compris? Vous y êtes?
Et oui, on est culturé ou on ne l’est pas! Vous avez remporté le prix Colemont du meilleur nanard de l’année, qui sera remis en grande pompe (ballerines s’abstenir), courant janvier lors la grande braderie du camembert loulé à la mouche de Livarot, avec la participation exceptionnelle du duo flamenco-normand de Stone and Charden. Tenue de soirée de rigueur!
Il s’agit de ces aficionados au teint pâle, aux yeux délavés de brumes boréales, aux rides burinées des reliefs charbonneux de la mine, à l’haleine chargée de bière et moules-frites, qui pissent comme je pleure sur les femmes infidèles.
Vous les connaissez, vous les croisez sans le savoir, au hasard d’un tendido, au détour d’un zinc andalou, sur une piste empoussiérée du Campo-Charro.
Oui, ce sont bien eux, les grands, les beaux, les généreux, nos amis, nos cousins, nos frères du Septentrion: les membres incontournables et valeureux du Club Taurin du Nord.
Et ils ont du mérite les gonzes. Se cogner 1000 ou 2000 bornes pour assouvir leur passion, quand d’aucuns «grands aficionados» de nos contrées ne sont pas capables d’en faire 20 pour visiter les placitas de la Gascogne profonde.
Et ils ont du savoir et de la finesse les gaillards, qui n’ont rien à envier aux gourous sudistes autoproclamés.
Et ils ont de l’enthousiasme et de l’entrain les bougres, comme en témoigne le bulletin périodique qu’ils ont régulièrement la gentillesse et la courtoisie de m’envoyer.
Il faut lire «Olés y palmas». C’est un must! C’est une gourmandise spirituelle, tantôt légère comme une soie indienne, tantôt profonde comme un brocard flamand, mais toujours intelligente, et surtout superbement écrite et pertinente. Le genre d’écrit sans prétentions, mais non sans mérites, qui ne vous reste pas sur l’estomac comme certains opus emphatiques.
«Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux,
Que des palais Romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine
»
Et c’est qu’ils citent de loin les redoutables, ils provoquent, ils titillent, ils avancent la jambe, ils desplantent même.
Revenant sur «l’affaire LAGORCE» (non pas Alain!), ce plumaillon éculé qui crût bon de faire l’intéressant en ramenant une science improbable alors qu’il eût mieux fait de rester dans les limbes de son insignifiance, Danièle HAINAUT, d’humeur taquine, brocarde ces débats homériques sur le sexe des anges qui nous occupent avec tant de ferveur.
Non, chère Danièle, nous ne sommes pas dupes des excès verbaux que nous commettons! C’est la race qui parle, ce jeu du mot, ces gasconnades sur des riens auxquels il nous divertit tant de nous adonner.
Certes, certains se prennent au jeu et sont persuadés que le sort de l’humanité se joue à Las Vegas, ou que les chutes répétées et la soseria (c’est un euphémisme…), annonciatrices du feu d’artifice final étaient inscrites de toute éternité dans les prophéties de l’apôtre de Patmos.
Ce n’est nullement le cas de toute la planète taurine.
Osons l’affirmer: il y a une vie possible en dehors des toros! Mieux! certains en jouissent…
Pour revenir au pitoyable Lagorce, ce qui m’a passablement agacé, c’est cette mode ridicule qui consiste à faire assurer le service après vente et la caution morale d’une monstrueuse connerie par un cheval de retour vaguement et éphémèrement célèbre, frotté de quelque vernis taurin.
Que Monsieur Lagorce soit intervenu pour dire qu’il avait éprouvé un orgasme tauromachique particulièrement glorieux au contact de Desgarbado, rien de plus légitime. Qu’il en ait détaillé les tenants et aboutissants, qu’il se soit esbaudi sur les détails d’une faena d’exception, pourquoi pas. Qu’il ait connu alors son chemin de Damas, grand bien lui fasse.
Mais qu’il se permette, sans qualification particulière, avec des sous-entendus cauteleux, et des allusions perfidement assassines de s’en prendre à ceux qui désapprouvaient, cela est insupportable. Et c’est ce qui a motivé les volées de bois vert qui l’ont, à juste raison, fustigé.
On y revient toujours. C’est la différence de l’autre qui nous semble insupportable. Et si les chipoteurs, les pinailleurs du «oui, mais» vous agacent, entendez, comprenez, admettez qu’il en aille de même dans l’autre sens. D’autant que ce jour là, il n’était pour ma part, nullement question de «oui, mais» mais d’un «non» ferme et définitif.
Sans doute me faut-il préciser que j’avais pris un franc plaisir le 17 août 1999 durant la corrida des 11 oreilles, nonobstant la pléthore d’appendices.
Le plaisir doit-il se taire? Ne supporte-il aucun commentaire, aucune limitation, aucun «après»?
Ce serait se priver de tout l’art érotique, de SAPPHO de Mytilène à Asha AMNOUR en passant par Louise LABBE ou Marguerite de Valois, pour ne citer que des femmes. Des noms qui ne doivent nullement échapper à votre érudition.
Certain(e)s ne font l’amour que dans le noir… mais il existe aussi les aubes triomphales et la douce pénombre des après-midis moites.
Pour autant, persistez chère Danièle dans des avis si vigoureux et si joliment écrits. Voilà qui réconforte, dynamise et suscite le débat, c’est à dire la relation entre humains de bonne volonté.
Et souffrez qu’en hommage je vous adresse ce merveilleux poème, qui explicite mieux que mes pauvres arguments le fond de mon propos. On n’a jamais fait mieux que les poètes pour tout dire en peu de mots:

Je vis, je meurs; je me brûle et me noye;
J'ai chaud extrême en endurant froidure:
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuis entremêlés de joie.

Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.

Ainsi Amour inconstamment me mène;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.

Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.

Louise LABE "Sonnet VIII"
.
PS: Peut-être Danièle HAINAUT ou Denis DAMMARETZ auront-ils la gentillesse de me transmettre l'article pour que je puisse le mettre en ligne.
2ème PS: Quand aurons-nous le plaisir et l'avantage de les accueillir à Orthez?

«Olés y Palmas»
Bulletin du Club Taurin du Nord
Danièle HAINAUT et Denis DAMMARETZ
Appartement 48. résidence Plein Ciel 1
59770 MARLY
Tel: 03.27.30.05.67
10 euros pour 4 numéros

lundi 12 octobre 2009

Il y a la Semaine Sainte de Séville mais aussi la 25ème Semaine Taurino culturelle de la Peña Jeune Aficion de Saint-Sever.
Sans doute la plus riche et la plus intelligente manifestation taurine qui soit, organisée par une peña digne de ce nom. Une peña qui ne se contente pas d'engranger des bénéfices et d'organiser des sauteries outre Pyrénées, mais continue, contre vents et marées, à croire que la tauromachie n'est pas seulement une tradition plus ou moins festive, mais aussi et surtout un savoir et une transmission, en un mot, une culture qu'il convient de nourrir et de développer par des conférences, des débats et des échanges.
A fréquenter sans modération.


dimanche 4 octobre 2009

EVIDENCES

Por Fernando Corella.
Puisque certains paraissent apprécier les dessins humoristiques, une récente importation du site d'Andrés Verdeguer Taléns (http://cornadasparatodos.blogspot.com/2009/10/una-vineta.html )
Traduction: "C'est bien que les enfants ne voient pas de corridas, ils pourraient devenir des personnes dépourvues de sensibilité comme Goya, Picasso, Lorca, etc."
En dessous de la colonne: Aux bons aficionados de Catalogne qui sont nombreux.